Trip'Tic

Tout va bien hamdoullah !

“ça va ? Kydayer ?”. C’est la question la plus répandue dans les échanges entre Marocains. La réponse varie selon l’humeur, mais se termine généralement par l’inévitable hamdoullah : biikher hamdoullah, chouiya hamdoullah, m9awda hamdoullah, jma3 koulchi et dit hamdoullah… Bref, Dieu est là et on n’a que ce qu’il veut bien nous accorder. Une zen attitude à rendre jaloux le dalaï-lama et à convertir même Bouddha à l’islam. Mais on peut voir aussi dans ce hamdoullah de la résignation. Beaucoup de résignation même. Car les Marocains en sont toujours à galérer pour satisfaire leurs besoins élémentaires : un toit, un job, un salaire… Voici les principales composantes du bien-être pour nos compatriotes selon une récente enquête du Haut commissariat au plan (HCP). Il en ressort que moins d’un Marocain sur trois kiffe sa life. Et encore, quand on va dans le détail, on se rend compte que c’est bien le hamdoullah qui atténue cette perception globale : quand il s’agit de logement, une bonne moitié de nos compatriotes ne sont pas satisfaits ; côté travail, un actif sur trois seulement est content de son revenu ; quant à la santé, on frôle les trois-quarts dans la catégorie des insatisfaits. Des chiffres qui ont le mérite de quantifier ce malaise perceptible à chaque coin de rue, enfoui dans des regards que l’on croise tous les jours… Un malaise que n’importe quelle étincelle peut transformer à n’importe quel moment en véritable explosion sociale. Mais cette réalité, on cherche tant bien que mal à l’ignorer et à en minimiser la gravité. Pour cela, on a une autre formule magique : ça ira mieux inchallah !

 

Paranormal Activity

Le Chef du gouvernement voit des ennemis partout ! Il ne cesse d’interpréter toute critique à son encontre comme une manœuvre menée par des parties obscures. Il n’y a pas un seul meeting où il ne parle pas de ces fameuses jihate qui veulent sa perte. Les termes “perturbateurs”, “agitateurs”, “démons”, “crocodiles”… sont désormais des figures imposées dans tous ses speechs. Même quand la chaîne Nessma TV le tourne en dérision dans son émission Les guignols du Maghreb, Benkirane y voit un bras long qui s’étend jusqu’en Tunisie et qui ne cherche qu’à le déstabiliser. Les médecins appellent ça de la paranoïa… Mais ça se soigne. Alors le Chef du gouvernement devrait sérieusement envisager de consulter. Il devrait prendre rendez-vous chez son collègue, le docteur Saâd-Eddine El Othmani, psy de son état et grand spécialiste de l’exorcisme. La preuve, le ministre des Affaires étrangères cohabite en toute sérénité avec le fantôme de son prédécesseur, Taïeb Fassi Fihri, qui hante son département. Il arrive même à El Othmani de voir l’ancien ministre dans les grand-messes diplomatiques et faire comme s’il n’existait pas. Il est capable de se convaincre que Taïeb n’est qu’une vision qu’il balaie en utilisant la médecine douce : pas de Prozac à lui faire perdre la boule en pleine assemblée générale de l’ONU, juste de petites séances de bkhour et un grigri dans la pochette… Ce remède, il pourrait bien le refiler à son Chef de gouvernement. Ça lui permettrait de vivre en harmonie avec ses Afarit qui ne le quittent jamais.

 

C’est du Bakkoury !

A force de sillonner le désert de Ouarzazate, Mustapha Bakkoury, patron de l’Agence solaire et du Parti authenticité et modernité, a visiblement pris un méchant coup de soleil. L’homme à la double casquette est effectivement parti dans un vrai délire lors de sa dernière sortie médiatique. Grosso modo, il a annoncé son intention de mettre de côté 6000 dirhams chaque année, en vue de les redistribuer aux plus nécessiteux. C’est sa manière à lui de restituer les subventions publiques pour les denrées alimentaires et les hydrocarbures dont il profite, comme tout Marocain qui fait ses courses. Un haut fonctionnaire au haut salaire de son acabit n’a pas besoin évidemment, de l’aide de la Caisse de compensation pour payer sa baguette, sa bonbonne de gaz ou son plein de mazout. Avec cette annonce, Bakkoury voulait sans doute souligner son désaveu de ce système inégalitaire de compensation dont la défaillance fait l’unanimité chez les politiques. Sauf que, dans l’approche, il est parti en vrille. Parler de 6000 dirhams par an quand on gagne au moins 15 fois plus par mois, c’est juste cheep… C’est comme s’il faisait un communiqué de presse pour chaque dirham distribué à un feu rouge ou s’il convoquait la presse internationale pour distribuer sa fetra de l’Aïd Sghir. D’un grand chef de parti, tête bien faite de surcroît, on attendait beaucoup mieux. Exemples : Un projet de loi pour instaurer un impôt sur la fortune ou une étude de référence pour réformer cette Caisse de compensation. Mais peut-être que le Bakkoury a bien compris que la politique n’est que démagogie…

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