Si le régime baasiste, aux commandes de la Syrie depuis 1963 venait à perdre la partie, c’est toute la région qui risque d’être chamboulée, notamment du fait de l’influence syrienne dans la vie politique libanaise et palestinienne.
Hassan Nasrallah, le secrétaire général du Hezbollah, organisation politique et militaire très puissante au Liban renouvelait son soutien au président syrien Bachar El Assad à l’occasion d’un discours prononcé le 18 juillet 2012. Il a tenu à rappeler que la Syrie a de tout temps été le principal soutien de la cause palestinienne et a soutenu son parti lors de la guerre qui l’a opposé à Israël en juillet 2006. L’appui à la cause palestinienne est un leitmotiv du régime de Damas – pour ne pas dire le fondement même de sa légitimité. La vérité semble aujourd’hui plus compliquée.
La division dans les camps de réfugiés palestiniens
La question du soutien au régime divise les presque 500 000 réfugiés palestiniens vivant en Syrie. En juin 2011, des affrontements causant plusieurs morts avaient déjà éclatés entre réfugiés dans la banlieue de Damas. La cause était la suivante : des Palestiniens accusaient le Front populaire de libération de la Palestine-Commandement général (FPLP-CG) groupe palestinien pro syrien, de les manipuler en vue de sauvegarder le régime. Et avec l’accélération du conflit, les camps de réfugiés sont dorénavant plongés dans la guerre à l’instar des autres villes du pays. Des assassinats de membres de l’armée de libération de la Palestine (ALP), une section de l’armée syrienne réservée aux Palestiniens, ce mois de juillet 2012, ont été imputés à des rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL). Le FPLP-CG, reprenant la terminologie du régime baasiste à son compte, a aussi accusé les « terroristes » – entendez l’ASL – des nombreux enlèvements survenus ces dernières semaines dans les camps. Au sein de l’ALP, les défections se multiplient ces derniers jours et de jeunes déserteurs palestiniens s’enrôlent même dans les rangs de l’ASL. Entre le 10 et le 13 juillet 2012, l’armée régulière syrienne a tué plusieurs Palestiniens solidaires de l’opposition dans le camp de Yarmouk, accueillant 144 000 réfugiés près de Damas. Même le mouvement islamiste palestinien Hamas, dont une partie de la direction a longtemps été gracieusement hébergé à Damas, semble prendre ses distances avec la dictature syrienne. En février 2012, Ismaïl Haniyeh, premier ministre du Hamas à Gaza saluait la révolte syrienne. Selon des rumeurs persistantes, Khaled Mechaal, une des têtes du mouvement, aurait même récemment quitté Damas. La tutelle syrienne semble remise en question.
Au Liban, la peur de la fracture
Certes le Hezbollah soutient mordicus Bachar El Assad – et le soutiendra vraisemblablement jusqu’au bout. Mais au Liban, malgré l’influence syrienne encore ressentie aujourd’hui, de nombreux citoyens ne cachent plus leur soutien à la rébellion. Le 18 juillet 2012, l’armée libanaise a dû se déployer dans la ville de Tripoli, habitée par des musulmans sunnites (majoritairement sympathisants du mouvement de révolte) et des Alaouites (souvent partisans du régime) pour éviter que n’éclatent des affrontements. Dans cette ville, des combats à l’arme lourde entre partisans et détracteurs du régime avaient déjà causé plusieurs morts entre mai et juin 2012. Les hommes politiques libanais, devant l’accélération du conflit, sont de plus en plus nombreux à prendre position pour un camp ou pour l’autre. Pour exemple, le 21 juillet 2012, le libanais druze Walid Joumblatt, président du Parti socialiste progressiste, qui a pourtant combattu les armes à la main aux côtés des forces syriennes dans les années 1980, appelait les Druzes du Liban et de Syrie, souvent supporters du régime baasiste, à lâcher Assad. Le lendemain, le Premier ministre libanais Nagib Mikati téléphonait quant à lui à l’ambassadeur syrien à Beyrouth pour lui présenter ses condoléances après que des faucons de Damas, artisans de la brutale répression qui sévit, aient péri dans un attentat la semaine d’avant. Une importante délégation de parlementaires se pressait aussi à l’ambassade pour assurer le diplomate de leur fidélité au régime. Devant cette situation, le quotidien libanais L’Orient Le Jour, titrait récemment : Face à la crise syrienne, deux Liban. De leurs côtés, de nombreux diplomates et analystes ne cachent plus leur inquiétude de voir le conflit syrien diviser la société libanaise.
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