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Gros salaires, levez-le doigt ?

Nos confrères d’Akhbar Al Yawm ont réalisé un joli coup. En publiant des documents du ministère des Finances révélant les niveaux de primes de Salaheddine Mezouar, ancien locataire de ce Département, et de Noureddine Bensouda, Trésorier général, ils remettent sur la table ce sujet tabou qu’est le salaire des hauts fonctionnaires. Surtout que les révélations du quotidien arabophone viennent au lendemain d’une séance parlementaire houleuse, perturbée par des déclarations fracassantes d’un élu PJD. Abdelaziz Aftati, le trublion député islamiste, avait en effet lancé une bombe : “Un ministre des Finances touchait 400 000 dirhams par mois comme dessous de table”. Alors comment va réagir Abdelilah Benkirane ? Considérer que c’est juste une nouvelle polémique entre opposition et majorité, qui va se tasser, est une insulte pour tous les Marocains. Il serait plus judicieux que le Chef du gouvernement, qui prêche la bonne gouvernance et la rationalisation des dépenses publiques, prenne une mesure toute simple : rendre public le détail des salaires, des primes et des indemnités de déplacement de tous les fonctionnaires. Tous, sans exception, avec un focus particulier sur les 100 plus gros revenus du secteur public. C’est le moindre des droits à l’information (consacré dans la Constitution) que le contribuable puisse accéder au détail des bulletins de paie de gens censés travailler pour lui…

Alors, on recense !

La médina de Casablanca s’écroule sur la tête de ses habitants. Deux drames, sept morts et une dizaine de famille dans la rue, le tout en moins d’un mois (lire p. 24). Et qu’est-ce qu’on prend comme mesures ? Comme d’hab, on décide de créer une “commission ad hoc”. Comme d’hab, celle-ci reçoit “de hautes instructions” pour un recensement exhaustif des habitations menaçant ruine. Et comme d’hab, il va falloir attendre longtemps avant de voir du concret. Ce process, long, ennuyeux et inefficace de l’administration, on le connaît par cœur : créer une commission, discuter une méthodologie de travail, organiser des rencontres régionales, rédiger un rapport, discuter ses conclusions, imaginer des mesures, négocier un budget, mettre en œuvre un plan d’action… Cela peut prendre des semaines, des mois, voire des années. D’ici là, combien de victimes devrait-on déplorer ? Il y a déjà des statistiques qui existent : elles sont déjà suffisamment alarmantes, même si elles sont obsolètes et sous-évaluées. Elles font état de 144 000 habitations menacées d’effondrement. Alors pourquoi ne pas passer directement à l’action ? Penser dans un premier temps à évacuer ces gens-là, le plus rapidement possible. Imaginer des mesures d’urgence, quitte à promulguer des lois exceptionnelles, temporaires. Quitte à ouvrir les vannes budgétaires, réquisitionner des hôtels, des maisons secondaires, des écoles… Peu importe le coût financier ou politique d’une telle démarche, ça ne sera pas cher payé si elle permet de sauver des vies.

Joue-la comme Ouzzine

On ne connaissait pas le ministre des Sports bon dribbleur. Mohamed Ouzzine vient de nous faire un passement de jambes digne de Mesut özil. La semaine dernière, il nous annonçait qu’il allait déborder dans son couloir : il allait convoquer le président de la fédération de football pour une audience à l’issue de laquelle seront annoncées des mesures révolutionnaires. Seulement, il n’a rien fait, walou, nada… Il est resté scotché sur sa ligne défensive : Ali Fassi Fihri n’a même pas été convoqué et la seule explication que les deux hommes ont eue se limite aux échanges de politesse d’usage dans la tribune officielle d’un match officiel. Et ce n’est pas la première fois que Ouzzine nous fait le coup. A la veille de sa prise de fonction, il avait annoncé que les Marocains avaient le droit de connaître le salaire du sélectionneur. Puis il a rongé son frein pour se ranger dans le clan des décideurs qui s’abritent derrière une curieuse clause de confidentialité dans le contrat de Gerets. Il faut donc conclure que personne ne peut plus rien pour notre équipe nationale. Pourtant, elle n’a pas besoin de mesures révolutionnaires. Peut-être juste changer de patron de la fédé et de sélectionneur. Deux responsables qui ont mal fait le job et qui doivent être mis sur le banc. Ils feraient d’ailleurs mieux de démissionner, question d’orgueil… 

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