Interview. Dieu, amour & rock’n’roll

Absent depuis 2007, le groupe Evanescence revient sur les devants de la scène avec un nouvel album, et une tournée mondiale qui les amènera à jouer au Maroc, en mai, dans le cadre du Festival  Mawazine. Entretien avec Amy Lee, leur chanteuse charismatique.

Vous avez disparu pendant presque cinq ans, juste après le succès de votre deuxième album The Open Door. Pourquoi ?

Après la sortie de ce disque, nous avons été en tournée pendant plus d’un an et demi. C’était très éprouvant, et j’ai ressenti le besoin urgent d’arrêter. A l’époque, je ne savais pas si c’était pour quelques mois ou pour toujours. Il y avait trop de pression autour de nous, et je me sentais traquée par rapport à ma vie privée. Je me suis mariée juste après la tournée, et j’ai alors préféré mettre ma carrière en stand-by, le temps d’y voir plus clair.

Vous avez continué à composer de la musique pendant cette période ou bien avez-vous  totalement arrêté ?

Il m’a fallu laisser passer un bon moment avant de m’y remettre. J’avais besoin d’un peu de temps pour moi, et pour cela je devais décrocher complètement. Mais j’ai très vite ressenti le besoin de renouer avec la musique, et également le manque de contact avec nos fans. Je n’ai jamais rien vécu de plus extraordinaire que l’expérience d’être sur scène, en communion avec notre public.

Evanescence, votre dernier album (sorti fin 2011) est différent de vos deux opus précédents. N’avez-vous pas eu peur que vos fans de la première heure soient déroutés ?

Honnêtement, pas vraiment. Je savais qu’ils allaient apprécier, parce que l’univers n’a pas réellement changé, même s’il y a de nouvelles sonorités. Par ailleurs, si les artistes évoluent forcément avec le temps, le public aussi. C’est tout à fait normal. Personne ne peut faire la même chose pendant plusieurs années.

Votre come-back se passe plutôt bien jusqu’ici. Etiez-vous inquiète à l’idée que ça puisse être un flop ?

On ne sait jamais à quoi s’attendre lorsque l’on revient dans l’industrie musicale après plusieurs années d’absence, surtout quand on ne fait pas vraiment de la musique “mainstream”. Mais jusqu’à présent, tout est parfait ! L’album cartonne aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, et la tournée, qui a débuté fin octobre 2011, est un réel succès.

Si vous deviez décrire votre album en un seul mot, que choisiriez-vous ?

Question difficile ! Je dirais tout simplement : Evanescence. Nous avions une liste énorme de noms pour l’album, mais aucun ne collait vraiment. C’est un disque qui a nécessité une très grosse production, sa réalisation a été épique… Donc je pense que le titre lui correspond très bien. Il nous a pris plusieurs années de travail. D’ailleurs, je ne comprends toujours pas comment certains artistes arrivent à produire un album en quelques semaines. ça me dépasse !

Est-ce difficile d’être une femme dans le milieu rock-métal américain ?

Oh que oui, surtout au début… Le public et les autres groupes étaient persuadés que je ne composais pas nos morceaux. Ils pensaient que notre musique était trop agressive et trop sombre pour être écrite par une femme. Ils s’imaginaient que les musiciens du groupe étaient le noyau du groupe, et qu’ils m’avaient choisie seulement parce que j’avais une jolie voix (rires).

Ca s’est arrangé depuis ?

Dieu merci, oui. Avec le temps, et avec le succès de nos albums, j’ai réussi à m’imposer, et je sais que j’ai gagné le respect et l’admiration du milieu rock-métal américain, mais également international. Cependant, cela n’a vraiment pas été facile, croyez-moi !

Vous êtes encore dérangée par les rumeurs qui affirment qu’Evanescence est un groupe de rock chrétien qui ne s’assume pas, de peur de faire fuir une grande partie de son public ?

Cette rumeur m’a toujours fait rire, surtout que je suis la seule véritable chrétienne du groupe (rires). Personnellement, je ne vais pas le cacher, Dieu tient une grande place dans ma vie, et sans lui je sais que je n’aurais pas surmonté plusieurs épreuves. Mais notre musique est universelle et ne parle pas de religion. Elle est simplement humaine et touche des fans du monde entier, de toutes religions et de toutes les origines.

Plusieurs fois, les médias américains ont annoncé que vous étiez sur le point de vous lancer dans une carrière solo. Vous confirmez ?

Ce n’est pas du tout d’actualité. Même s’il est vrai que, ces dernières années, j’ai composé plusieurs morceaux que je veux partager avec le public. Je ne l’ai pas encore fait car ils ne collent pas du tout avec l’univers musical du groupe, et, pour l’instant, je suis à fond dans Evanescence… Néanmoins, il n’est pas invraisemblable qu’un jour je sorte un album avec toutes ces compositions.

Saviez-vous que vous étiez populaires au Maroc, avant que le Festival Mawazine ne vous invite à participer à son édition 2012 ?

Durant ces dernières années, j’avais effectivement remarqué que nous avions des fans dans votre pays, mais je ne pensais pas qu’ils étaient aussi nombreux, et surtout, je n’avais jamais imaginé qu’un jour on y jouerait. Je suis surexcitée à l’idée de ce concert, j’en parle à tous mes proches… Je ne connais pas très bien le Maroc, je sais seulement que vous avez une culture très intéressante, et j’ai hâte de rencontrer nos fans marocains !

Vous comptez donner un concert “spécial” pour l’occasion ?

Etant donné que c’est la première fois que nous allons nous produire au Maroc, nous n’allons pas jouer uniquement les titres du nouvel album. Le public aura droit à tous nos plus gros tubes, même si nous n’avons plus l’habitude de les interpréter dans le cadre de notre tournée actuelle, parce qu’ils sont trop anciens, et que certains ne nous ressemblent plus vraiment. Mais ne vous en faites pas, nous jouerons Bring me to life et My Immortal…

 

Parcours. Les Gothic rockers de l’Arkansas

Formé en 1996 à Little Rock, petite ville de l’Etat de l’Arkansas, Evanescence a aujourd’hui à son actif plus de 20 millions d’albums vendus dans le monde. Sorti en 2003, Fallen, le premier opus d’Amy Lee et de ses joyeux lurons, est un succès planétaire grâce à des tubes tels que Bring me to life ou encore My immortal. Les mélodies entraînantes et la voix sublime de la chanteuse ont permis de séduire un public très large, qui n’écoute pas forcément du rock ou du métal d’habitude. Le style gothic rock du groupe est très accessible, et attire des dizaines de milliers de spectateurs lors de leurs concerts aux quatre coins du monde. Trois ans plus tard, après plusieurs frictions et départs au sein du groupe, Evanescence sort The Open Door. L’album se vend beaucoup moins que Fallen, mais des titres tels que Call me when you’re sober cartonnent dans les charts. Le groupe prouve ainsi qu’il est loin d’être un simple phénomène de mode. Cependant, après la tournée de cet album, Amy Lee déclare que le groupe va faire une pause. Les fans s’inquiètent et des rumeurs de séparation commencent à circuler. Début 2011, la chanteuse dément et annonce qu’ils sont en studio pour travailler sur un troisième album, qui devrait être “le meilleur de leur carrière”. En octobre de la même année, le groupe sort donc Evanescence, album qui marque leur grand retour et leur maturité musicale. L’opus est aussi sombre que les précédents, mais plus riche au niveau des compositions et des textes. Un chef d’œuvre à découvrir en live, lors de leur concert au Festival Mawazine, dimanche 20 mai à la scène OLM-Souissi.

 

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