La vente aux enchères se passe désormais sur le Net avec des prix qui défient toute concurrence. Plusieurs sites marocains s’y sont lancés. Double clic.
Avec un peu de chance, Jamila, jeune femme au foyer, peut acheter un réfrigérateur 3 fois moins cher que le prix de vente… sans faire le tour des magasins ! Installée confortablement devant son laptop, la jeune femme multiplie les clics pour augmenter ses chances de s’adjuger l’appareil mis en vente. Car il s’agit bien d’une vente aux enchères en ligne. “J’ai découvert ce site de vente aux enchères il y a quelques semaines. Au début, je n’y croyais pas trop, mais depuis que j’ai décroché un micro-ondes à 90 dirhams je multiplie les enchères”, assure-t-elle, enthousiaste.
Très en vogue aux Etats-Unis et en Europe, les sites de e-commerce dédiés à la vente aux enchères viennent d’être lancés au Maroc, au grand bonheur des férus de bonnes affaires. “Nous étions les premiers à nous lancer dans ce business. Après une phase d’expérimentation, qui a duré plusieurs semaines, notre site a été mis en ligne officiellement le 1er janvier dernier”, indique Moulay Rachid Fayçal, directeur général de jeclic.ma. Et le succès est tout de suite au rendez-vous. Quelques semaines après le lancement, le patron du site ne tarde pas à voir les internautes défiler sur son portail. “Aujourd’hui, on compte pas moins de 8500 inscrits”, assure-t-il, pas peu fier. Un bon début qui a très vite fait des émules. Flairant le bon filon, une dizaine de sites lui ont emboîté le pas sur la Toile.
Comment ça marche ?
Le principe est très simple : le produit, neuf et sous garantie, est mis en vente à… 0,10 dirhams. A l’ouverture des enchères, les membres inscrits se disputent le produit et à chaque clic (surenchère) le prix augmente de 10 centimes. Si au bout de deux minutes, aucune personne ne clique pour surenchérir, le dernier joueur remporte le produit au prix affiché. “Les joueurs peuvent faire de très bonnes affaires. à titre d’exemple, un iPad a été vendu à 600 dirhams”, assure le patron de jeclic.ma. Intéressant… Mais avant de s’exciter sur le clavier, un petit clic sur la rubrique inscription s’impose pour avoir le droit de jouer. En cadeau, le site vous offre 3 clics, histoire de tester la machine. Après, il faudra mettre la main à la poche et acheter un pack de clics (monnaie du site) pour pouvoir enchérir sur les produits qui vous plaisent.
La gamme des produits mis en vente est très variée (électroménager, smartphones, laptops…) et il y en a pour toutes les bourses : de 50 à 4000 dirhams… pour ceux qui veulent tenter le gros lot. Une fois ces formalités accomplies, les choses sérieuses peuvent commencer. “Tout dépend du nombre de participants et les bonnes surprises ne manquent pas. Dernièrement, un iPhone 4 tout neuf a été remporté à 50 dirhams. Mieux, il arrive parfois que le joueur rafle le produit avec les 3 clics qui lui sont offerts par le site”, assure Moulay Rachid Fayçal. Une bonne affaire !
Jouer malin
La bataille est souvent très acharnée entre les participants pour décrocher le pactole. Et disposer d’un pack très bien garni en clics ne veut pas dire forcément avoir le dernier mot. Car l’enchère est une course de longue haleine qui nécessite patience et jeu tactique. Par exemple, un téléviseur LCD vous tape dans l’œil et vous voulez absolument vous le procurer. Pour ce faire, vous achetez un pack de 100 dirhams, sachant que chaque enchère (clic) coûte près de 3,5 dirhams. En tout, vous disposez donc de 28 clics. Est-ce assez pour décrocher la télé ? Pas sûr ! Face à des enchérisseurs qui ne veulent pas lâcher prise, le solde risque d’être épuisé en un clin d’œil.
Quelle est la solution alors ? Laisser les autres enchérir et ne participer que quelques secondes avant la fin du compte à rebours (2 minutes). Sauf que l’opération peut durer des heures, voire des jours, avec un couvre-feu à 23 h et une reprise des enchères le lendemain à 7 h. “Tout dépend de l’engouement des joueurs et de la valeur de l’objet mis en vente. L’opération peut se solder en quelques minutes comme elle peut prendre 48 heures”, explique Moulay Rachid Fayçal. Les plus malins ont trouvé une autre solution : faire appel aux services d’un robot. Il s’agit, en fait, d’un système d’enchère automatique. Il suffit d’indiquer au robot le nombre d’enchères à placer et le seuil maximum à ne pas dépasser, et lui se charge du reste quand vous n’êtes pas devant votre écran. Ingénieux.
And the winner is…
Ce n’est qu’après ce combat à couteaux tirés avec les autres enchérisseurs que le produit est adjugé. Le site prend à sa charge la livraison du butin à domicile gratuitement. Que gagne donc le site dans cette affaire ? “Nous faisons nos bénéficies sur la vente des packs de clics. En 3 mois, nous avons fait un chiffre d’affaires de 180 000 dirhams, ce qui est encourageant. Maintenant, nous pensons à d’autres formules pour développer ce marché”, explique le patron de jeclic.ma.
En réalité, la marge de bénéfices du site est très importante. L’exemple de la vente de la télé est à cet égard frappant. Après une course effrénée, l’heureux gagnant s’est adjugé le téléviseur LCD à 500 dirhams. Pas mal ! Sauf qu’au total, les enchérisseurs en lice ont “dépensé” 3000 clics au prix de 3,5 dirhams l’unité. En clair, la télé a été payée à
10 500 dirhams alors que sa valeur marchande est de près de 3000. Sacrée différence ! En fin de compte, c’est le site organisateur qui s’en met plein les poches. Avec quelques dizaines de produits écoulés chaque jour, l’organisateur des enchères engrange un joli paquet. Les enrichisseurs perdants, eux, doivent se remettre à leurs claviers pour prendre leur revanche !
Législation. Un vide juridique La vente aux enchères en ligne, comme d’autres activités virtuelles, semble prendre de court le législateur. Il apparaît qu’en dehors des dispositions générales, la réglementation de ce business reste très floue. D’autant que les intérêts en jeu sont non négligeables : contrefaçon des produits mis en vente, garantie de la livraison, protection des consommateurs… “Toutes les opérations sont contrôlées par Maroc Télécommerce et le Centre marocain interbancaire. Mais c’est un fait, il n’y a malheureusement pas de cadre juridique dédié à ce commerce, indique Moulay Rachid Fayçal, DG de jeclic.ma. D’ailleurs, nous sommes en contact avec ces deux organismes pour remédier à ce problème”. Le plus tôt serait le mieux car il y a beaucoup de points à tirer au clair autour de ce type de ventes… |
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