Pitoyable conseiller
Parlementaire : un job bien payé pour faire des siestes prolongées dans un fauteuil confortable et très attachant. C’est la description de la fonction de barlamani que l’on peut déduire des propos du conseiller Abdelkrim Bounmer, qui vient d’accorder une interview surréaliste à nos confrères d’Akhbar Al Youm. Pour ce syndicaliste, l’accès à la deuxième chambre en 2009 a changé sa vie : il s’est s’engagé dans un crédit immobilier pour se payer une maison et a pu inscrire ses enfants dans une école privée… Mais aujourd’hui que la deuxième chambre va être dissoute et son salaire de plus de 30 000 dirhams va s’évaporer, Bounmer se retrouve dans la mouise. Comprenez, sa maison risque d’être saisie et ses rejetons refoulés à la porte de leur établissement scolaire pour cause d’impayés. Et c’est pour cette raison que Bounmer milite bec et ongles avec d’autres conseillers pour le prolongement du mandat de cette chambre du parlement (censé être renouvelée avant fin 2012). “Bien sûr qu’en défendant cette revendication, je défends aussi mes intérêts. Il n’y a pas de mal à cela. Tous ceux qui manifestent devant le parlement sont animés par des motivations individuelles”, persiste et signe l’honorable élu de la nation. M. Bounmer n’a sans doute pas compris une chose capitale : c’est dans l’espoir de ne plus avoir des profils comme lui (et encore moins comme son collègue qui a jeté une lettre de doléances aux pieds du roi) que cette chambre mérite au moins d’être renouvelée.
A table avec les salafistes
Samedi 10 mars, dans une villa au quartier des Ambassadeurs à Rabat, un déjeuner réunissait les chioukh salafistes, récemment graciés, et des leaders politiques réputés. Une petite souris était là pour recueillir et nous rapporter (pas très) fidèlement des bribes de conversation. Extraits exclusifs.
Mohamed Elyazghi : Si Kamal, ne me refusez pas ce morceau de méchoui. Cette partie de l’agneau était la préférée de Omar Benjelloun.
Brahim Kamal : Que Dieu ait son âme, meskine. Il n’a même pas eu le temps d’avaler un petit-déj quand les frères lui sont tombés dessus.
Mohamed Khalidi : Allay yerham tous les musulmans. Et surtout que Dieu nous aide à apaiser les cœurs. Marhba al ikhwan, vous nous honorez de votre visite et que Dieu remplisse la maison des Kettani qui nous accueille.
Hassan Kettani : Dar darkoum, mais j’aurais aimé que vous fréquentiez cette maison quand je croupissais en prison.
Mahmoud Archane : Wallah Si Kettani que je demandais souvent des nouvelles de la famille. C’est un ancien collègue commissaire qui était en charge de la surveillance de vos proches.
Mustapha Bakkoury : Changeons de sujet. Dites-moi Cheikh Abou Hafs, à la prison de Fès, vous aviez des chauffe-eau solaires ?
Omar Haddouchi : A3oudou billah des douches de prison et de tout le fisk qui s’y passe.
Mahjoubi Aherdane : Vous avez de la chance. A mon époque, dans les geôles des Français, il n’y avait même pas d’eau courante.
Mohamed El Fizazi : De la chance vous dites. Allez mordre dans le pain blindé et les lentilles caillouteuses qu’on sert en taule.
Abdellah Kadiri : Si Aherdane s’est déjà cassé les dents en politique.
Khalid Sefiani : Là, c’est de la provocation mon colonel…
Mohamed Khalidi : On se calme. Oublions le passé et regardons vers l’avenir. Tenez, que direz-vous si je transformais Annahda Wal Fadila en parti salafiste. Il y en a maintenant en Egypte, en Tunisie, pourquoi pas au Maroc ?
Abdelkrim Benatik : La crème glacée a l’air succulente, mais je dois me sauver.
Un bon père de famille
Mustafa Ramid confirme jour après jour que c’est un fin politicien. Depuis qu’il a été nommé ministre de la Justice, il fait un sans-faute. Il a obtenu la grâce des salafistes, augmenté les salaires des juges, réactivé des affaires brûlantes, lancé la justice de proximité, tenté de réconcilier avocats et magistrats… Son département a sans doute été l’un des plus actifs en ce début de mandat du gouvernement Benkirane. Mais ce qui est encore plus fin chez Ramid, c’est sa communication extra-gouvernementale. Pas de sortie de route par rapport aux festivals, ni de dérapages au sujet de la culture propre… Lui, il fait son taf en restant égal à lui-même et en faisant preuve d’une simplicité et accessibilité exemplaires. On peut le croiser dans le train Rabat – Casa, lui serrer la main à la faculté de médecine lors de la soutenance de la thèse de sa fille aînée, se prendre en photo avec lui à la faculté dentaire à l’occasion de la cérémonie de remise de diplôme de sa cadette. Bref, Ramid véhicule l’image d’un ministre entreprenant mais qui gère son département en bon père de famille. Que lui demander de plus ?
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous
Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer