Le père du Plan d’intégration de la femme remet ça en nous expliquant comment, dans son esprit, une alliance entre les anciens communistes du PPS et les islamistes du PJD est une totale aberration.
En décidant de se joindre au gouvernement PJD, le Parti du Progrès et du Socialisme a renié ses principes et renoncé à ce qui faisait sa spécificité. Porteur des valeurs du socialisme qu’il a été le premier à défendre et à promouvoir durant le protectorat, le PPS a payé un lourd tribut (déportation de ses dirigeants, répression de ses cadres, interdiction du Parti Communiste Marocain, etc.) pour que triomphent la démocratie, la liberté, la souveraineté populaire et la justice sociale. Et ses dirigeants historiques, à l’image du penseur Aziz Belal, n’ont eu de cesse de dénoncer les aspects négatifs de l’idéologie passéiste.
Et voilà que la direction actuelle du PPS décide de sceller une forte alliance avec les défenseurs du traditionalisme dans ses formes extrêmes : opposition farouche aux principes d’égalité et d’équité des sexes sous le faux prétexte de préserver les spécificités culturelles du Maroc, approche liberticide des droits humains, attaques frontales contre la liberté de création culturelle au nom de la défense de l’art “propre”, etc.
C’est ça, la “révolution nationale démocratique” ?
La décision de rejoindre le gouvernement du PJD tranche frontalement avec sa théorie des alliances, selon laquelle il est nécessaire de constituer un large front national formé des forces progressistes et démocratiques en vue de réaliser les objectifs de la “Révolution nationale démocratique”.
Pas plus tard que l’année dernière, le 8ème Congrès national adoptait à l’unanimité une ligne politique très claire qui circonscrivait ses alliances dans trois sphères : la Koutla (Istiqlal, USFP, PPS), les forces de gauche et le camp démocratique et moderniste. Il convient de noter qu’en matière d’alliances, le PPS a tout essayé : alliance avec le parti Al Ahd (parti ayant vu le jour suite à une scission du Mouvement populaire) et le FFD, tentative d’alliance avec le Parti travailliste et le Parti socialiste, etc.
Comment expliquer cette inconsistance dans la gestion des alliances et cette volte-face dans le positionnement politique du parti de feu Ali Yata ? Plusieurs éléments viennent à l’esprit. D’abord, un certain flou artistique marque le positionnement idéologique du PPS depuis la chute du Mur de Berlin. Cela transparaît nettement dans la littérature du parti où des concepts tels que socialisme, lutte des classes, propriété sociale des moyens de production, classe ouvrière ont quasiment disparu des documents et des discours des dirigeants du PPS. A la place ont fleuri des expressions relevant du social-libéralisme : libertés politiques, privatisations, gouvernance, classes moyennes, libre-échange, etc.
Ensuite, la base sociale du PPS a changé de manière sensible. Le recours aux notables sous prétexte de gagner des sièges aux élections législatives et communales a fini par éloigner les cadres et les intellectuels alors qu’ils avaient constitué, pendant longtemps, son vivier. Par ailleurs, les quelques positions qu’il avait conquises dans certaines villes comme Casablanca ont complètement disparu. Il est significatif de ce point de vue que tous les sièges que le PPS a remportés au titre des listes locales lors des dernières élections législatives l’ont été en milieu rural !
J’y suis, j’y reste !
Il est important de noter que l’exercice du pouvoir par le PPS depuis le gouvernement d’alternance a fait naître des ambitions de promotion sociale et encouragé l’apparition de pratiques clientélistes. Et il n’est pas exagéré de dire que le parti est devenu l’otage de lobbies constitués par certains cadres impatients d’occuper des positions au sein du pouvoir – et d’y rester !- ainsi que de notables voulant consolider leurs positions locales et assurer la promotion de leur progéniture et de leurs réseaux familiaux.
En conclusion, on peut affirmer qu’en rejoignant le gouvernement du PJD, le PPS a fortement entamé son identité et s’est aliéné toutes les forces de progrès et de modernité qui le tenaient en haute estime.
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