Reportage: ouverture de procès houleuse pour Nabil Ahemjik et 20 autres détenus du Hirak

Le procès de 21 détenus du Hirak dont Nabil Ahemjik, ouvert sous très haute tension ce mardi à Casablanca, a été ajourné au 3 octobre prochain. Ambiance.

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Sit-in en soutien aux détenus du Hirak devant la Cour d'appel de Casablanca. © KO / Telquel

Ambiance particulière ce mardi 12 septembre à la Cour d’appel de Casablanca. Un sit-in improvisé par une dizaine de personnes, en soutien aux détenus du Hirak, a été organisé dès 9h du matin à l’entrée de la cour. La sécurité du tribunal a été renforcée.

Après avoir passé deux contrôles de police, on accède à la salle d’audience numéro 8. Là, 21 militants du Hirak, dont Nabil Ahemjik, l’un des meneurs du mouvement de protestation avec Nasser Zafzafi, Mohamed Asserhi, le directeur du site Rif24, comparaissent pour la première audience de leur procès devant la première chambre criminelle de ladite Cour.

Pleine à craquer, la salle abritait d’un côté la famille, les proches des détenus ainsi que quelques membres de la société civile, de l’autre côté, se trouvent 17 militants du Hirak en état de détention provisoire, dans un box en verre et bien entourés par une dizaine de policiers. Au total, ils sont 21 accusés, dont quatre poursuivis en état de liberté. L’un d’eux n’était pas présent à l’ouverture du procès.

Visiblement en forme, les accusés cherchent du regard leurs proches, se dérobent de la surveillance policière en saluant l’audience et en brandissant le V de la victoire. Barbe blanche, visage terne, un des proches des détenus du Hirak est ému et laisse échapper discrètement quelques larmes. « On n’attend que leur libération« , nous dira-t-il sobrement plus tard à l’extérieur de la salle d’audience.

Devant le juge que l’on distingue au fond, une soixantaine d’avocats du comité de défense du Hirak se tiennent debout. On les entend à peine, mais le ton monte très rapidement entre le juge et les avocats sur la manière de présenter les accusés. « Monsieur le juge, il faut respecter la procédure« , crie un des avocats. Un autre se demande sur le même ton: « est-ce qu’on est devant un procès équitable? « .

La confusion est totale et l’audience est levée, le temps que les esprits se calment. « Nous avons protesté, car le juge a voulu dans un premier temps appeler les accusés un à un et leur demander qui les représente, alors que l’ensemble des accusés est défendu par tous les avocats ici présents« , nous explique Me Isaac Charia, membre du comité de défense du Hirak, qui déplore aussi la présence des prévenus à l’intérieur d’un box.

Protestations

10h, les esprits se calment enfin  et l’audience peut reprendre. Le juge remarque alors qu’un accusé (le quatrième poursuivi en état de liberté provisoire) manque à l’appel. « Il n’a pas pu se présenter, car il n’a pas été convoqué comme ceux présents qui ont fait le déplacement de manière spontanée« , argue la défense. Le bâtonnier Abderrahim Jamaï demande au juge d’ajourner le procès « pour préparer la défense« . Une requête acceptée.

La deuxième audience est prévue le 3 octobre prochain. Pendant ce temps, des membres de la section locale du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) notent les détails de l’audience. « Nous sommes présents en qualité d’observateurs de ce procès. Est-ce qu’il se déroule dans de bonnes conditions, comment se comporte-t-on avec les familles des détenus, etc. « , nous explique Soumicha Riyaha, présidente de la Commission régionale des droits de l’Homme de Casablanca-Settat.

Le comité de défense demande alors la liberté provisoire pour les 17 prévenus poursuivis en état de détention. Le ton monte. Me Jamaï fait une longue allocution sur la problématique de la détention provisoire et la nécessité de libérer les militants du Hirak.

D’autres avocats prennent le relais pour défendre la demande de liberté provisoire. « La solution est entre vos mains Monsieur le juge« , exhorte l’un des membres du comité de défense. Un autre relève que « la voie de l’emprisonnement n’est pas celle de la réconciliation« .

Abdessadek El Bouchatoui, un autre avocat du Hirak ajoute pour sa part qu' »il n’y a pas de faits aggravants » dans le dossier pouvant justifier de garder les militants du Hirak en détention. Le ton monte une nouvelle fois, poussant le juge à lever l’audience, sous les « Acha Rif » (vive le Rif) scandés par une partie de l’audience et les accusés.

À la sortie de la salle d’audience, Zakaria Kaddouri, militant du Hirak poursuivi en état de liberté nous déclare: « le moral est bon, mais j’ai l’impression qu’il n’y a aucune communication entre les avocats et le juge« . Il nous dit avant de repartir:  » j’espère que les détenus seront relâchés « . La journée s’annonce longue, car l’audience rependra et le juge ne se prononcera sur la liberté provisoire que dans quelques heures…

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