Mohamed Nech-Nech: "Nous espérons que le roi Mohammed VI gracie les détenus du Hirak"

Mohamed Nech-Nech, porte-parole de "l’Initiative civile pour le Rif", fait le point sur la situation de la contestation dans la région d'Al Hoceima, ainsi que sur celle de Nasser Zafzafi et des autres détenus du Hirak.

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Crédit : Tniouni

Telquel.ma : Tentez-vous une médiation avec l’État pour mettre fin à la crise à Al Hoceima ?

Avec cette initiative, nous ne faisons pas de la médiation. Nous écoutons simplement toutes les parties concernées  pour comprendre ce qui se passe à Al Hoceima. Nous avons effectué notre premier déplacement dans cette ville et ses environs du 5 au 8 juin. Nous avons assisté aux manifestations à Sidi Abed et Imzouren. Nous avons écouté les jeunes du Hirak et leurs familles, mais aussi les officiels comme le procureur du roi, le wali de la région, les élus locaux, et même des sécuritaires.

Maintenant que les leaders du Hirak sont emprisonnés,  avec qui avez-vous discuté?

Il est vrai que les leaders du mouvement ont tous été arrêtés, mais d’autres figures ont émergé. Nous les avons rencontrées, mais je ne peux pas vous révéler leurs identités pour ne pas leur porter préjudice car ils sont menacés d’arrestation. D’ailleurs ceux qui nous ont accompagnés sur le terrain ont été arrêtés dans la foulée.

Quelle évaluation faites-vous de la situation dans le Rif après vous être rendus sur le terrain?

Ces jeunes manifestent depuis plus de 7 mois avec un seul mot d’ordre « silmia » (pacifique), ce qui est complètement légitime. Malheureusement, le gouvernement et les autorités n’ont pas ouvert le dialogue avec les manifestants. Il y a eu du laisser-aller, mais en même temps il n’y a pas eu d’arrestation.

Ce n’est qu’après l’incident de la mosquée que la situation a basculé. Les séries d’arrestations, les affrontements avec les forces de l’ordre ont attisé les tensions. Il y a des arrestations quotidiennes et c’est dangereux. Il y a eu beaucoup d’erreurs commises par les partis politiques, mais aussi par le gouvernement. Ils ont traité les manifestants de séparatistes et de traitres à la nation alors que ce n’est pas vrai! La diabolisation des manifestants est une erreur!

Cela étant, certains manifestants du Hirak sont accusés d’« atteinte à la sécurité intérieure de l’État« , d' »ébranlement de la loyauté des citoyens« , ou encore d' »incitation à la révolte armée et d’autres crimes« . Quel regard portez-vous sur ces accusations?

La justice n’a toujours pas tranché ces accusations. Ceux qui ont été condamnés jusque-là n’ont rien fait de mal. Ce ne sont pas des criminels et nous considérons que les jugements sont très durs. Cette série de condamnations et d’arrestations ne résout pas le problème.

Vous avez rendu visite aux leaders du Hirak la semaine dernière. Comment s’est déroulée cette rencontre ?

Les leaders du Hirak comme Zafzafi concèdent qu’ils ont commis des erreurs, mais sont dans l’incompréhension face aux lourdes accusations auxquelles ils font face. Ils nous ont avoué que la libération des détenus était à l’heure actuelle une priorité pour eux. Ces jeunes sont en bonne santé, ils ne subissent pas de mauvais traitements, mais ils ont entamé depuis une semaine une grève de la faim pour réclamer leurs droits de prisonniers comme les visites par exemple. Mais ils gardent espoir. On espère que le roi va intervenir en les graciant.

Un flou persiste autour du nombre de manifestants détenus, interpellés ou arrêtés. La Coalition marocaine des instances de droits de l’Homme par exemple évoque 128 détenus. Votre collectif dispose-t-il de chiffres?

Nous avons dénombré 200 détenus, dont ceux qui ont été condamnés. Et on ne peut pas emprisonner tous les jeunes de la région. C’est insensé.

Vous avez rencontré des représentants du gouvernement. Que pense Mustapha Ramid, ministre d’Etat aux Droits de l’Homme, de cette situation ?

Mustapha Ramid a expliqué que la situation est entre les mains du ministère de l’Intérieur. Toutefois, il concède qu’il y a des dérives, mais il espère trouver une issue à cette problématique.

Quelles sont les prochaines actions prévues par votre collectif?

Maintenant que le rapport est publié, nous allons effectuer d’autres visites sur le terrain.

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