Qu’a fait HSBC ?
Selon le quotidien français Le Monde, qui a révélé avec 55 autres médias internationaux l’ampleur de l’affaire SwissLeaks le 9 février, les procédés mis en place par la banque s’apparentent à une incitation massive à la fraude fiscale en cours de 2005 à 2007. Le journal français a réalisé une infographie animée qui décrypte les méthodes de HSBC.
Comment les listings des clients ont-ils été révélés ?
C’est Hervé Falciani, ancien informaticien de HSBC Private Bank, qui a volé en 2007 les listings pour les communiquer à la justice. En 2009, ces listings, transmis à la justice française, ont permis de démasquer 79 000 clients de la banque et ainsi permis de nombreux redressements fiscaux. En 2012, il avait déjà collaboré avec les autorités américaines dans le cadre d’un autre scandale HSBC, celui de la filiale américaine de la banque britannique.
Mais c’est d’une autre source – dont ils préservent l’anonymat – que les journalistes du Monde disent avoir obtenu ces listings volés par Hervé Falciani, qui étaient jusque-là entre les mains de la justice.
Quels délits ?
Dans le cas de HSBC Private Bank (filiale suisse)
– Évasion fiscale : Le premier des délits représentés par la fraude fiscale, c’est évidemment l’évasion fiscale, qui soustrait des rentrées fiscales à l’État dont est originaire le fraudeur.
– Trafic d’armes, diamants de guerre et corruption : Au-delà de la fraude fiscale, l’opacité de la provenance des fonds et le secret bancaire qui les entourent permettent soit le blanchiment soit même le financement d’activités illégales. Le Consortium international des journalistes d’investigation, qui a coordonné les révélations du SwissLeaks, s’indigne ainsi de ce que « HSBC Private Bank [Suisse] a continué d’offrir des services à des clients qui avaient été cités défavorablement par les Nations unies, dans des documents légaux et dans les médias, pour leur lien avec le trafic d’armes, les diamants de guerre ou la corruption ».
Parmi ces derniers, Rami Makhlouf, cousin du président syrien Bachar Al-Assad, ou l’ex ministre égyptien du Commerce Rachid Mohamed Rachid, condamné en 2011 à 5 ans de prison pour abus de biens sociaux après qu’il a détourné les fonds prévus pour le développement de son pays. On peut également citer Aziza Kulsum et sa famille, identifiées par les Nations unies comme bailleurs de fonds de la guerre civile au Burundi dans les années 1990.
– Financement du terrorisme : Certains membres d’une cellule d’une vingtaine de donateurs du réseau terroriste Al Qaïda, connue sous le terme « La Chaîne d’or », avaient déposé de l’argent chez la filiale suisse de HSBC. Le journal suisse Le Temps (dans un article réservé aux abonnés) relève que « dans au moins trois cas, il s’avère que HSBC a poursuivi la relation bancaire avec des clients soupçonnés publiquement d’avoir financé le terrorisme ».
Dans le cas de la filiale américaine d’HSBC (scandale de 2012/2013)
Précédemment, un scandale avait éclaté en décembre 2012 aux Etats-Unis , avec la collaboration là encore d’Hervé Falciani.
– Blanchiment de l’argent de la drogue : HSBC a été reconnue coupable par la justice américaine d’avoir blanchi au minimum 7 milliards de dollars provenant de l’argent de la drogue des cartels mexicains et colombiens, de 2003 à 2010. Elle avait alors été condamnée à payer une amende de 1,9 milliard de dollars.
– Terrorisme (déjà) : Les autorités américaines avaient établi que la filiale américaine de HSBC avait financé et fourni des services à la banque saoudienne Al Rajhi Bank, soupçonnée de liens avec des groupes terroristes.
– Corruption / violations d’embargos internationaux : En 2013, un rapport du Sénat américain accusait également HSBC d’avoir servi d’intermédiaire à six banques iraniennes pour contourner illégalement les sanctions américaines contre l’Iran, et de même avec la Corée du Nord, Cuba, le Soudan et le Birmanie.
L’affaire Madoff (2008 – aujourd’hui)
– Escroquerie : en 2012, la banque HSBC a été condamnée pour complicité avec l’escroc Bernard Madoff, et fait toujours l’objet de poursuites judiciaires en ce sens.
Quelles conséquences juridiques ?
La Belgique envisage de lancer des mandats d’arrêt internationaux contre les responsables de la banque, après avoir déjà inculpé la filiale suisse de HSBC pour fraude fiscale et blanchiment d’argent. Dans ce pays et en France, la banque fait l’objet de poursuites pour « fraude fiscale grave et organisée », « démarchage bancaire et financier illicite », et « blanchiment aggravé de fraude fiscale ».
Suites aux récentes révélations du Monde, on apprend que deux équipes franco-belges et franco-espagnoles ont même été constituées, tandis que trois autres pays, les Etats-Unis, l’Italie et l’Allemagne, ont sollicité l’aide judiciaire de la France. D’autres poursuites sont en préparation depuis plusieurs années, grâce aux données communiquées par la justice française. Le Royaume-Uni, notamment, a déclaré vouloir enquêter sur le volet fiscal comme sur le volet blanchiment.
Quelle réponse de la part de HSBC ?
HSBC a répondu immédiatement, dès dimanche 8 février, jour des révélations du Monde et des médias associés à l’ICIJ. La banque britannique a admis des « défaillances passées » de sa filiale suisse. Mais HSBC les a expliqué par l’intégration incomplète de cette filiale suisse, acquise en 1999, au groupe, « ce qui pourrait avoir eu pour conséquence qu’un certain nombre de clients pourraient ne pas avoir totalement respecté leurs obligations fiscales ».
HSBC assure que sa filiale suisse a subi ces dernières années une « transformation radicale » et que ces pratiques ont été bannies.
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