Après la grâce royale, soulagement et appels à “continuer le combat”

La grâce accordée par Mohammed VI à la journaliste Hajar Raissouni et à ses codétenus a suscité une vague de réactions au sein de la société civile, mais aussi du côté de la classe politique.

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Hajar Raissouni, grâciée le 16 octobre, retrouve les siens après 47 jours de détention. Crédit: Fadel Senna/ AFP

Quarante-sept jours après son arrestation avec son fiancé devant une clinique de Rabat, Hajar Raissouni a retrouvé le 16 octobre sa liberté. Condamnée le 30 septembre dernier à un an de prison ferme pour “avortement illégal” et “relations sexuelles hors mariage”, la journaliste de 28 ans a été graciée par le roi Mohammed VI. Son fiancé et son gynécologue qui avaient également écopé de peines de prison ferme, ont été libérés au même moment. Très vite, la nouvelle a fait le tour des réseaux sociaux au Maroc, mais aussi à l’étranger, suscitant une vague de réactions dans différents milieux.

Une grâce royale unanimement saluée

Si le chef du gouvernement actuel n’a pas encore commenté cette décision, son prédécesseur Abdelilah Benkirane a estimé que “le roi avait examiné son dossier avec discernement”. “Une décision sensée et porteuse de sens”, a-t-il déclaré au site web du quotidien Akhbar Al-Yaoum où travaillait la journaliste avant son interpellation, félicitant Hajar Raissouni et les autres prévenus pour leur libération.

Le ministre d’Etat chargé des Droits de l’Homme et des relations avec le Parlement, Mustapha Ramid, estime quant à lui qu’avec cette décision, Mohammed VI “a rétabli l’ordre des choses […] avec un geste humanitaire exceptionnel, qui répond aux souhaits et aspirations de ceux qui veulent du bien au pays”. Un geste qui, pour Ramid, est plein de “sagesse”.

السلام عليكمكالعادة يأبى جلالة الملك محمد السادس حفظه الله إلا أن يعيد الأمور إلى نصابها، ويتجاوب في التفاتة انسانية…

Publiée par ‎المصطفى الرميد‎ sur Mercredi 16 octobre 2019

Pour Ahmed Raissouni, oncle de la journaliste et cofondateur du Mouvement unicité et réforme (MUR), l’initiative du roi est “louable et appréciée”. “Je félicite Hajar, son fiancé, le médecin et ses assistants. Je leur dis à tous de revenir à leurs postes sains et saufs, honorés et entourés par la sympathie royale et la solidarité populaire”, écrit celui qui est actuellement à la tête de l’Union internationale des oulémas musulmans (UIOM), dans un article publié sur son site web.

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Je remercie et apprécie tous ceux qui ont soutenu Hajar dans son procès, y compris les avocats, journalistes, juristes et intellectuels. Ils ont donné lieu à un cas typique de solidarité avec les opprimés et de confrontation avec les oppresseurs. […] Je peux dire que la décision royale de libérer ces détenus innocents constitue une condamnation claire de l’injustice qu’ils ont subie”, poursuit Ahmed Raissouni. Dans son texte, le théologien a aussi souligné que le roi “n’a pas attendu de fête religieuse ou nationale, comme il est de coutume, pour accorder la grâce royale pour les prisonniers” et qu’il a “parlé franchement de l’association légitime qui réunit Hajar et son fiancé, ce que la cour a nié et ridiculisé, la considérant simplement comme une tentative d’induction en erreur de la justice”.

Un combat qui ne fait que commencer

Invitée à intervenir dans un débat sur l’avortement à la Faculté de médecine privée de l’université Mohammed VI des sciences de la santé de Casablanca, la secrétaire générale du Parti socialiste unifié (PSU), Nabila Mounib, a également commenté la libération de la journaliste. “Hajar Raissouni est libre, mais il reste encore beaucoup de travail à faire au niveau du Code pénal. Quand j’ai appris la nouvelle, je m’attendais à ce qu’on m’annonce aussi la libération des détenus du Rif”, nous a-t-elle déclaré sur place.

Egalement invité au débat, le gynécologue et militant Chafik Chraibi a d’abord tenu à “remercier le roi d’avoir gracié Hajar Raissouni”. Et d’enchaîner : “Les réseaux sociaux jouent un rôle important dans les débats sociétaux. Un rôle même plus important que celui du Parlement. Quand j’ai été démis de ma fonction de chef de service au sein de l’hôpital des Orangers de Rabat, c’est grâce à la mobilisation sur les réseaux sociaux que j’ai pu retrouver mes fonctions.

De son côté, l’écrivaine Sonia Terrab, co-initiatrice du manifeste “Hors-la-loi” avec Leila Slimani, estime que “la libération de Hajar est une victoire, mais cela ne veut pas dire que le combat est fini. Aujourd’hui, nous avons eu besoin d’une grâce royale pour libérer Hajar. Dans le Maroc de demain nous n’en aurons pas besoin”. L’écrivaine a au passage remercié “tous ceux qui ont signé, partagé ou relayé le manifeste”, soulignant que c’est grâce à eux que la loi va changer.

Des ONG nationales et internationales, ainsi que des acteurs de la société civile, ont également fait part de leur soulagement après la libération de la journaliste et des autres prévenus :

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