Britanniques et Européens se préparent à un échec des négociations

Les négociations sur le Brexit entre Londres et les Européens semblent au bord de la rupture à un peu plus de trois semaines de la date prévue, Bruxelles accusant le Premier ministre britannique Boris Johnson de jouer avec "l'avenir de l'Europe".

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Rencontre entre le Premier ministre britannique Boris Johnson et le président du Conseil de l'Europe, Donald Tusk, le 23 septembre. Crédit: AFP

Les Européens ont donné jusqu’à la fin de la semaine au gouvernement britannique pour leur présenter un compromis acceptable et arriver à une séparation à l’amiable le 31 octobre, après 46 ans de vie commune. Sans attendre cette échéance, les deux parties ne cachent pas leur pessimisme. Après un entretien téléphonique matinal mardi entre le dirigeant conservateur et Angela Merkel, une source à Downing Street a jugé un accord “pratiquement impossible”.

Selon cette source, la chancelière allemande a prévenu Boris Johnson qu’un accord était “extrêmement improbable” faute de nouvelles propositions de Londres prévoyant un maintien de l’Irlande du Nord britannique dans l’union douanière européenne. Ce que Londres refuse, son plan prévoyant simplement un alignement réglementaire, mais pas douanier, avec la république d’Irlande voisine, membre de l’UE.

Il s’agit d’éviter le rétablissement d’une frontière physique entre les deux Irlande et préserver la paix sur l’île, après plusieurs décennies de violences. Interrogé par l’AFP, le gouvernement allemand s’est refusé à tout commentaire sur le contenu de la conversation. Sur Twitter, le président du Conseil européen, le Polonais Donald Tusk, a accusé Boris Johnson de jouer avec “l’avenir de l’Europe et du Royaume-Uni” avec un “stupide jeu de reproches” sur les responsabilités d’un échec des négociations sur le Brexit.

Cet échange Johnson-Merkel a eu lieu alors que de difficiles négociations se tiennent à Bruxelles pour éviter un “no deal” le 31 octobre, sur la base d’un projet présenté mercredi dernier par le dirigeant britannique. La livre sterling a accusé le coup. “La dernière lueur d’espoir a disparu”, a souligné Neil Wilson, analyste pour Markets.com.

Les propositions présentées la semaine dernière par Londres pour tenter de mettre fin au casse-tête de la frontière irlandaise ont été rejetées en l’état par les Européens. L’UE refuse le droit de veto que Londres souhaite accorder à l’assemblée et à l’exécutif nord-irlandais, et rejette les propositions du plan pour les contrôles douaniers entre les deux Irlande.

Les discussions devaient se poursuivre mardi à Bruxelles, après que Londres eut tenté la veille d’apporter des clarifications. Mais selon une source européenne, “rien n’a bougé”. En l’état, le projet de Londres n’est “pas encore suffisant pour convaincre” Bruxelles et “à ce rythme-là, on voit mal comment on pourrait être prêt pour le Conseil” européen des 17 et 18 octobre, a indiqué une autre source.

Arrivé au pouvoir fin juillet, Boris Johnson s’est engagé à sortir le Royaume-Uni de l’UE à tout prix le 31 octobre, malgré une loi le contraignant à demander un report si aucun accord n’est trouvé d’ici au 19 octobre, juste après ce sommet européen présenté comme celui de la dernière chance.

Selon une source de Downing Street citée par le magazine The Spectator, le dirigeant table sur un échec des négociations avec l’UE et fera “toutes sortes de choses” pour éviter un délai. “Nous indiquerons […] clairement que ce gouvernement ne continuera pas à négocier, tout report serait donc totalement inutile”, a indiqué cette source.

Dans un document faisant le point sur les mesures prises en vue d’un potentiel “no deal”, Boris Johnson assure que son pays “est préparé” à une telle option. Mais le centre de réflexion Institute for Fiscal Studies (IFS) en a dressé un scénario noir, avec un plongeon de l’activité économique et une chute des recettes fiscales, et par ricochet une explosion du déficit public du Royaume-Uni.

Si un délai était accordé, Boris Johnson ferait campagne pour un “no deal” en cas d’élections législatives anticipées, afin de “marginaliser” l’europhobe Parti du Brexit, a prévenu la source dans The Spectator. Selon l’ex-ministre du Travail Amber Rudd, qui a démissionné du gouvernement en septembre, cette source serait Dominic Cummings, conseiller spécial de Boris Johnson et cerveau de la victoire du “Leave” lors du référendum sur le Brexit en 2016.

En mode préélectoral, le gouvernement souhaite suspendre le Parlement après la fin des débats mardi soir, comme il est de coutume, pour pouvoir présenter son programme de politique nationale lundi prochain.

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