“La fermeture de la SAMIR serait une erreur stratégique” selon l'Agence internationale de l'énergie

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié son deuxième rapport sur la politique énergétique au Maroc. Pour l’Agence, la fermeture de la raffinerie de SAMIR expose le Maroc aux risques de la chaîne d'approvisionnement mondiale.

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Un employé de la SAMIR à la raffinerie de Mohammedia. Crédit: DR

Au Maroc, la politique énergétique et climatique a connu des évolutions majeures depuis la première étude approfondie publiée par l’AIE en 2014, et depuis l’évaluation de l’AIE sur les technologies d’énergie propre au Maroc de 2016”, note le rapport de l’examen approfondi sur les stratégies énergétiques du Maroc, effectué à la demande du ministère marocain de l’Energie.

Le document, qui porte un regard critique sur le secteur énergétique du Royaume, mentionne néanmoins, de prime abord, les efforts déployés par le gouvernement et salue son engagement dans la promotion du développement durable du secteur des énergies renouvelables. Il salue à ce titre la diversification de l’approvisionnement énergétique, le développement des volets énergies renouvelables, mais également le positionnement de l’efficacité énergétique au rang de priorité nationale.

Une transition énergétique ambitieuse

Le Maroc poursuit une voie de transition énergétique ambitieuse”, souligne l’AIE. Dans ce sens, l’AIE met en avant les efforts déployés par le Royaume pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 42% à l’horizon 2030. “Cet objectif pour 2030 est très ambitieux”, note l’Agence qui rappelle aussi que “le gouvernement commence également à travailler sur une stratégie de développement sobre en carbone pour 2050”.

Cette transition énergétique est également assurée par le développement de l’électricité renouvelable. “Alors que la stratégie énergétique nationale de 2009 prévoyait de développer l’électricité renouvelable afin qu’elle représente 42% de la capacité installée en 2020, ce chiffre a été revu à la hausse en 2015, avec un objectif de 52% à l’horizon 2030”, lit-on dans le rapport. Cette nouvelle stratégie “permettra au Maroc d’abandonner l’usage du pétrole et du charbon, et de s’engager sur la voie d’une croissance industrielle durable”, poursuit le rapport.

Le document met également en lumière la transition réalisée par le Maroc vers des produits et des appareils plus efficaces grâce “à une interdiction des importations de véhicules anciens, à l’amélioration de la réglementation thermique applicable aux nouveaux bâtiments, et à des initiatives de sensibilisation qui encourage l’amélioration de l’efficacité énergétique et l’utilisation des énergies renouvelables”. Ceci permettra de renforcer les mesures d’efficacité énergétique et d’atteindre les objectifs énergétiques et climatiques fixés, note le rapport.

SAMIR, le grand gâchis

La dépendance énergétique du Maroc est l’un des points négatifs relevés par les auteurs du rapport. Celle-ci “a des répercussions évidentes en termes de sécurité énergétique et d’économie nationale”, explique l’AIE. Le constat dressé que le rapport s’appuie notamment sur les carburants fossiles qui représentent 90% de l’approvisionnement total en énergie primaire, et 80% de l’approvisionnement électrique. En 2017, la facture des importations énergétiques s’élevait à 69,5 milliards de dirhams.

Le Maroc importe également la totalité de ses besoins en produits pétroliers. Pour l’Agence internationale de l’énergie, cette situation est due en partie à l’absence d’installations de stockage des produits pétroliers, essentiellement après la mise en liquidation judiciaire de la raffinerie la SAMIR en 2015. “La non-utilisation des installations de stockage de produits pétroliers de la raffinerie SAMIR, ainsi que le non-respect des distributeurs des produits pétroliers de leurs obligations de stockage en produits pétroliers pendant plusieurs années soulignent la nécessité d’améliorer la sécurité de l’approvisionnement en produits pétroliers”, alerte l’Agence.

En s’accordant avec le Conseil de la concurrence sur le rôle stratégique de la SAMIR, l’unique raffinerie du pays, l’AIE note que sa fermeture a eu des répercussions évidentes sur la sécurité de l’approvisionnement en pétrole. “Le Maroc se trouve donc de plus en plus exposé aux risques de la chaîne d’approvisionnement mondiale, avec une couverture de stock inférieure au minimum légal pour tous les produits”, souligne le rapport. Dans le même sens, l’AIE félicite le gouvernement pour “ses plans en faveur d’une augmentation de la capacité de stockage des produits pétroliers et pour son mécanisme de surveillance des approvisionnements en produits pétroliers, qui permet également de contrôler la quantité et la qualité des produits”. L’agence lui recommande sur ce point “d’améliorer les mécanises de collecte de données sur les stocks de pétrole, d’assurer la disponibilité future de réservoirs de stockage de pétrole à la raffinerie SAMIR et d’améliorer la résilience des infrastructures portuaires”.