Amina Bouayach s'attire les foudres du PJD 

L’intervention de Amina Bouayach sur l’affaire Hamieddine, le 23 février sur le plateau de Médi1TV, n’a pas été appréciée par certains membres du PJD. À leur tête : Boutaina Karrouri, l’épouse du député poursuivi pour le meurtre de Mohammed Aït El Jid Benaissa.

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Une photo de l'étudiant gauchiste Mohammed Aït El Jid Benaissa, diffusée pendant l'émission VOX du 23 février 2019. Crédit: Capture d'écran

Le passage de Amina Bouayach dans l’émission VOX, diffusée samedi soir par Médi1 TV, n’a pas plu à certains dirigeants du Parti de la justice et du développement (PJD). La présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a été interrogée sur plusieurs sujets d’actualité, comme les détenus du Hirak, l’intervention de la police le 20 février dernier pendant une manifestation des enseignants contractuels à Rabat ou encore sur l’état des libertés individuelles au Maroc. Le présentateur du programme l’a également fait réagir sur le procès de Abdelali Hamieddine, poursuivi pour « complicité d’assassinat », dans le meurtre en 1993 de l’étudiant gauchiste Mohammed Aït El Jid Benaissa.

« Premièrement, je pense qu’il faut respecter la plainte déposée par la famille de la victime. Ensuite, je pense que dans des affaires comme celles-ci, il n’y a pas de délai de prescription en matière de droits de l’homme », a-t-elle estimée. « Il faut que nous ayons confiance en la justice qui peut trancher en faveur de monsieur Hamieddine, comme il peut se prononcer en faveur (ndlr, de la partie plaignante) », poursuit-elle.

Pour Amina Bouayach, si la justice a rouvert le dossier, c’est qu’elle n’a pas encore dit son dernier mot dans cette affaire. « Même sur le plan international, on trouve plusieurs cas similaires. Pourquoi avoir peur si nous n’avons rien à se reprocher ? », s’est-elle ensuite interrogée, estimant qu’« il n’y pas de place aux tensions dans cette affaire ».

Les propos de la présidente du CNDH n’ont pas tardé à faire réagir les députés du PJD. Pour l’avocat et secrétaire général de la jeunesse du parti, Mohamed Amakraz, « les déclarations de Mme Amina Bouayach, (…) fraichement nommée en ce qui concerne le dossier d’Abdelali Hamieddine, sont hors-sujet et ne sont pas dignes d’une présidente d’une institution constitutionnelle de cette importance ».

"تصريح السيدة امينة بوعياش رئيسة المجلس الوطني لحقوق الإنسان المعينة حديثا . بخصوص ملف عبد العالي حامي الدين تصريح خارج…

Publiée par ‎Mohamed Amakraz – محمد أمكراز‎ sur Dimanche 24 février 2019

Boutaina Karrouri, députée PJD et épouse de Abdelali Hamieddine, a elle publié une longue lettre ouverte à l’attention de Amina Bouyache. Dans son texte, elle commence par rappeler que l’article 41 de la Loi sur la réorganisation du CDNH dispose que « les membres du conseil doivent s’abstenir de prendre toute position, d’afficher toute conduite ou d’effectuer toute action de nature à porter atteinte à leur indépendance ». Pour elle, Amina Bouayach « s’est écartée du devoir d’indépendance et est intervenue ouvertement dans un sujet qui relève du pouvoir judiciaire ».

رسالة مفتوحة إلى أمينة بوعياش رئيسة المجلس الوطني لحقوق الإنسان" يلزم أعضاء المجلس بالامتناع عن اتخاذ أي موقف أو…

Publiée par Boutaina Karrouri sur Dimanche 24 février 2019

Le meurtre de l’étudiant Mohammed Ait Ljid Benaïssa, proche de la mouvance de gauche, remonte au 25 février 1993, pendant des affrontements avec des militants islamistes à l’université Dar El Mehraz de Fès. Condamné en 1994 à deux ans de prison ferme pour son implication présumée dans le meurtre, Abdelali Hamieddine avait alors purgé sa peine avant d’être reconnu « victime » à son tour par l’Instance équité et réconciliation qui a décidé de l’indemniser. Ce sont les proches d’Aït El Jid qui ont voulu rouvrir le dossier sur la base de nouvelles révélations attribuées à Haddioui El Khammar, le seul témoin des faits.