La création du Conseil national des langues retardée par la majorité

Prévue pour le 14 décembre, la discussion en commission concernant le projet de loi portant création du conseil national des langues et de la culture marocaine a été reportée. Des débats au sein de la majorité sur la création d'une instance chargée de la promotion des langues étrangères n'ont pas trouvé d'issue. Ce texte est bloqué au parlement depuis 2016.

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La Chambre des représentants. Crédit: MAP

Le Conseil national des langues et de la culture marocaine verra-t-il le jour ? La réunion du 14 décembre de la commission de l’enseignement, de la culture et de la communication au sein de la chambre des conseillers, et dont l’objet était la discussion du projet de loi organique numéro 04.16 portant création du conseil, a été reportée à une date ultérieure. En cause, l’incapacité du ministre de l’Education Saaïd Amzazi a trouvé un compromis au sein de la majorité.  » Lorsque des divergences apparaissent au sein de la majorité, le ministre en charge du dossier doit jouer le rôle d’arbitre, chose qu’Amzazi n’a pas réussi à faire. Ce qui a fait que les réunions pour adopter les amendements et voter la loi ont été reporté plusieurs fois,  » a expliqué à Telquel Arabi une source parlementaire proche du dossier.

Le désaccord au sein de la majorité concerne l’article 17 de cette loi, et qui dispose la création d’une instance chargée de la promotion des langues étrangères. Pour le  PJD, la création de cette instance serait inconstitutionnelle. Les députés du parti de la lampe s’appuient dans leur affirmation sur le quatrième paragraphe de l’article 5 de la constitution marocaine. Le texte dispose que la mission prioritaire du conseil est « la protection et le développement des langues arabe et amazighe et des diverses expressions culturelles marocaines, qui constituent un patrimoine authentique et une source d’inspiration contemporaine. » Créer une instance au sein du conseil pour promouvoir les langues étrangères serait antinomique avec la mission première de cette institution.

Pour d’autres partis de la majorité, l’instance doit être créée au sein du conseil afin d’encourager l’utilisation des langues étrangères et l’ouverture à d’autres cultures. Ces partis s’appuient sur le troisième paragraphe du même article constitutionnel, et qui dispose que l’Etat veille « à l’apprentissage et la maîtrise des langues étrangères les plus utilisées dans le monde, en tant qu’outils de communication, d’intégration et d’interaction avec la société du savoir, et d’ouverture sur les différents cultures et sur les civilisations contemporaines. »

Créé par la constitution de 2011, la loi organique créant et organisant le Conseil national des langues et de la culture marocaine a été déposée au parlement en 2016. Depuis, le texte n’a pas réussi à franchir le cap de l’examen en commission pour être débattu en séance plénière. L’institution sera chargée d’émettre des avis dans toutes les questions d’ordre linguistique. Selon l’article 3 du projet de loi, le conseil peut «apporter un appui technique aux différentes institutions et instances concernées par la mise en œuvre du projet de loi relatif à l’officialisation de l’amazighe. » Elle peut être saisie par le roi, le chef du gouvernement ou les présidents des deux chambres du Parlement.

Le futur conseil sera composé de 25 membres dont six nommés par le roi. Les autres membres sont des représentants du Conseil supérieur de l’éducation, du Corcas, de l’académie Mohammed VI de la langue arabe, de l’Académie du Royame, de l’IRCAM, mais aussi des représentants du monde universitaire, associatif et culturel, et de l’administration publique. Les membres du conseil auront un mandant de 5 ans, renouvelable une seule fois.

De nombreux dossiers attendent le nouveau conseil, dont l’adoption de la langue amazighe, l’encouragement de l’enseignement des langues étrangères. Il devra aussi prendre position dans le débat concernant l’officialisation de l’enseignement de la darija.


Mise au point du ministère de l’Education

Dans un courrier parvenu à la rédaction de Telquel.ma, le ministère de l’Education réagit à la publication de cet article. Dans cette mise au point , le département de Saaid Amzazi pointe que la création du Conseil relève du ministère de la Culture et non pas de celui de l’Education.

Voici les explications du ministère de l’Education  :

–  Contrairement à ce qui a été rapporté par l’auteur de l’article, qui a prétendu que « la discussion du projet de loi organique numéro 04.16 portant sur la création du dudit conseil a été reportée, alors qu’il devait être discuté le 14 décembre à la chambre des représentants. En cause, l’incapacité du Ministre de l’Education, Saïd Amzazi, à trouver un compromis au sein de la majorité… »,  nous précisons que la préparation du projet de loi organique 04-16 portant la création du Conseil national des Langues et de la Culture Marocaine relève de la compétence du Ministre de la Culture et de la Communication, Monsieur Mohamed Laaraj, lequel l’a d’ailleurs présenté en personne en Janvier 2018 à la Chambre des Représentants, devant la Commission de l’Enseignement, de la Culture et de la Communication (cf. http://www.chambredesrepresentants.ma/fr/actualites/le-conseil-national-des-langues-et-de-la-culture-marocaines-un-mecanisme-de-protection-du?sref=item1468-64661).

– Par ailleurs, ce projet a été déposé à la Chambre des Représentants en 2016, soit deux années avant la nomination de Monsieur Saaïd AMZAZI en tant que Ministre de l’Education Nationale, de la Formation Professionnelle, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique.