Un sommet du Golfe s'ouvre à Ryad sur fond de crises multiples

Les six pétromonarchies arabes du Golfe ont entamé dimanche à Ryad les travaux de leur sommet annuel par des appels à préserver l'existence de leur regroupement régional et à contenir la crise interne qui oppose certains de ses membres au Qatar.

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Rencontre du CCG à Jeddah en mai 2016. Crédit: AFP

La réunion du Conseil de coopération du Golfe (CCG) se tient dans un contexte de crises multiples: dispute persistante avec le Qatar, dont l’émir est absent, guerre au Yémen et affaire Khashoggi, du nom du journaliste tué au consulat saoudien d’Istanbul.

Malgré ces enjeux, aucune annonce majeure n’est attendue. Et, sans surprise, malgré l’invitation protocolaire qui lui avait été transmise, l’émir cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani n’est pas venu à Ryad. Le Qatar est ainsi représenté par le numéro deux de sa diplomatie, le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Sultan al-Merrikhi, selon un porte-parole officiel à Doha.

Son petit mais richissime pays reste ostracisé par ses puissants voisins que sont l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, qui l’accusent de soutenir des groupes islamistes radicaux –ce que Doha dément– et de leur préférer l’Iran.

Malgré l’absence de l’émir qatari, le roi Salmane d’Arabie saoudite a défendu dans un bref discours inaugural la nécessité de « préserver l’entité qu’est » le CCG.

Il a accusé l’Iran de « continuer à s’ingérer dans les affaires des pays de la région« . « Ceci nous pousse à préserver les acquis de nos pays et à défendre en collaboration avec nos partenaires la sécurité et la stabilité dans le Golfe« , a-t-il ajouté.

Le roi Salmane a aussi défendu l’intervention menée par son pays au Yémen depuis 2015 et souhaité une « solution politique » dans ce pays ravagé par la guerre, comme en Syrie.

De son côté, l’émir de Koweït, cheikh Sabah al-Ahmed al-Sabah, qui a tenté une médiation entre le Qatar et ses voisins, a appelé à contenir cette crise, la plus grave de l’histoire du CCG.

Il a invité à « mettre fin aux campagnes de presse ayant semé la discorde (entre les peuples de la région) pour préparer le terrain à une réconciliation« .

En juin 2017, l’Arabie saoudite, les Emirats, le Bahreïn – un autre membre du CCG – et l’Egypte ont rompu tout lien avec Doha et ces quatre pays ne semblent pas prêts à desserrer l’étau autour de l’émirat gazier.

Outre les liens diplomatiques, ils ont mis fin à toute relation économique et commerciale avec le Qatar qui, pour sa part, a décidé de quitter en janvier prochain l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), dominée par l’Arabie saoudite.

Le CCG comprend également le Koweït et Oman, qui sont restés à l’écart de la dispute.

Ce groupement régional, né en 1981 sur un réflexe d’autodéfense face à l’Iran a perdu, au fil des ans, de sa pertinence.

A l’issue de la séance plénière, les participants au sommet doivent continuer leur travaux à huis clos avant de publier en soirée un communiqué final.

Le sommet du CCG se tient alors que les belligérants yéménites sont réunis en Suède sous les auspices des Nations unies pour trouver une issue à la guerre qui ravage depuis 2015 le Yémen.

L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont concernés en premier lieu par ce conflit, étant les piliers de la coalition militaire contre les rebelles Houthis, alliés à l’Iran.

Le Qatar est entré à reculons dans cette coalition, avant de s’en retirer.

Les pourparlers en Suède n’auraient pas pu se tenir si Ryad n’avait pas encouragé son allié, le gouvernement yéménite du président Abd Rabbo Mansour Hadi, reconnu par la communauté internationale, à s’y rendre.

Les images de dévastation provoquée par les raids aériens de la coalition menée par l’Arabie saoudite au Yémen et celles de la crise humanitaire, décrite comme la pire au monde par l’ONU, ont convaincu les grandes puissances de la nécessité d’accélérer un règlement du conflit.

L’Arabie saoudite reste également sous pression, empêtrée dans l’affaire de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi, tué dans le consulat de son pays début octobre à Istanbul.

Ce meurtre d’abord nié puis reconnu par Ryad embarrasse au plus haut niveau le royaume, d’autant plus que la responsabilité du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a été évoquée dans cette affaire en Turquie et aux Etats-Unis.

Le Qatar a tiré indirectement profit des critiques et des pressions subies par Ryad de la part de nombreux élus américains, qui ne suivent pas le président Donald Trump dans sa démarche consistant à dédouaner le jeune prince héritier saoudien.