Budget 2017: Driss Jettou fustige les politiques sociales et suggère un changement de cap

Dans son rapport publié et présenté le 23 octobre, la Cour des comptes note une augmentation de l'endettement. Son président, Driss Jettou, appelle l'Exécutif à entamer une refonte de l'investissement public. 

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Driss Jettou au perchoir du Parlement.

La Cour des comptes est sceptique quant à «l’impact direct» de l’investissement public sur les «conditions sociales de la population». C’est ce qu’a affirmé Driss Jettou ce mardi, lors de la présentation, devant les deux chambres du Parlement, du rapport sur l’exécution du budget de l’État en 2017.

«Notre pays n’est pas encore parvenu à réduire les disparités et à contenir la pauvreté et la précarité de la population dans plusieurs zones et régions du Royaume», s’est inquiété l’ancien Premier ministre. Par ailleurs, ce rapport très attendu de la Cour des comptes pointe une augmentation du déficit et du niveau d’endettement.

Un déficit budgétaire moins lourd qu’en 2016…

C’est l’une des principales conclusions du document de plus de 700 pages. L’année 2017 s’est soldée par un déficit budgétaire de 37,843 millions de dirhams, contre des prévisions de 32,969 millions. Les 4,874 millions de dirhams d’écart s’expliquent par des dépenses globales supérieures aux recettes ordinaires : 7,114 contre 3,329 millions de dirhams.

Cependant, on note aussi que la «trajectoire positive» observée depuis 2012 est maintenue. En effet, s’il reste supérieur aux prévisions, le déficit enregistre cette année une baisse de 13, 7% en comparaison avec l’exercice précédent.

Par rapport à l’année 2016, les recettes ordinaires ont été plus importantes que les dépenses globales, notamment grâce aux recettes de l’impôt sur les sociétés (IS) et à la TVA qui ont augmenté respectivement de 7 et 4 millions de dirhams. La contribution, estimée à 2.315 millions de dirhams, de certains pays membres du Conseil de coopération du golfe – dont l’Arabie saoudite, le Qatar, le Koweït et les Émirats arabes unis – permet également cette augmentation.

…mais une dette qui continue de se creuser

De son côté, la dette du Trésor public s’est légèrement accentuée par rapport à 2016. Le ratio d’endettement est ainsi passé de 64,9% à 65,1% du PIB. Si l’encours de la dette, soit la somme globale des crédits en cours, approche des 35 millions de dirhams qui «correspond à un accroissement de 5,3% par rapport à l’année 2016», celle-ci a été «atténuée par une augmentation significative du PIB», explique le rapport.

«Si le déficit s’aggrave et la tendance haussière de l’endettement se poursuit, l’objectif de ramener le taux de la dette du Trésor par rapport au PIB à 60% à l’horizon 2021, retenu dans le programme gouvernemental 2017-2021, s’annonce difficile à atteindre», prévient la Cour des comptes. Principalement ciblé, le passif fiscal accumulé par l’État vis-à-vis des secteurs privés et publics: 50 millions de dirhams.

Les SEGMA sous-exploitées

En 2017, on dénombre 208 services de l’État gérés de manière autonome (SEGMA). Leur nombre est quatre fois plus important qu’en 2016. 77% de ces SEGMA sont actifs dans le secteur social , alors que l’économie y est représentée à 18%.

Néanmoins, la Cour des comptes constate que sur la période 2012-2017 les recettes propres des SEGMA ne pèsent que 29,5% de leurs recettes globales, plus de la moitié de leurs recettes réalisées étant l’objet d’excédents antérieurs. La Cour des comptes recommande préconise l’autonomisation de ces services, ainsi qu’une réduction des dotations d’équilibre qui leur sont allouées. 

Politiques sociales fustigées, l’éducation en tête 

Lors de la présentation du rapport, Driss Jettou a recommandé à l’Exécutif de privilégier un développement «équilibré» et «générateur de revenus et d’emplois», afin de tendre vers un nouveau modèle de développement capable de «réduire les disparités sociales et les inégalités existantes» et «instaurer une justice sociale».

Principal point concerné : l’éducation. Le président de la Cour des comptes explique qu’après plusieurs missions menées par son institution, cette dernière a relevé l’absence d’un bilan global « au niveau financier et quantitatif de la portée du programme d’urgence de l’Éducation et de la Formation 2009-2012».

Une situation qui, a plus large échelle, nécessite « une mobilisation globale et une gestion optimale de ces ressources, dans le cadre d’une approche visant le ciblage approprié de la population et des zones concernées et la priorisation des programmes de soutien social qui ont démontré leur efficacité sur les plans national et international», a-t-il poursuivi. Jettou appelle les pouvoirs publics à renforcer le soutien à la scolarisation, l’assistance médicale, le pouvoir d’achat des couches sociales nécessiteuses, et d’une manière générale la lutte contre la pauvreté et la précarité sur la base de procédures simplifiées d’accès à ces aides.

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