A El Haouzia, découverte de la mer en colonie de "vacances pour tous"

A El Haouzia, des enfants marocains découvrent la mer pour la première fois aux côtés d'enfants de réfugiés en colonie de vacances grâce au programme «Vacances pour tous» mis en place par ministère de la Jeunesse. Pour tous ces jeunes, la séparation avec les parents reste l'épreuve la plus difficile. Reportage.

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Grâce au programme "Vacances pour tous" de jeunes Marocains et enfants réfugiés partent en colonie.

A quelques pas de la page d’Azemmour, en provenance d’un complexe, des cris d’enfants résonnent. Relevant de la direction régionale du ministère de la Jeunesse et des Sports d’El Jadida, ce bâtiment est, avec les quelques campeurs installés sur la plage, le seul élément brisant le décor de ce paysage de carte postale. Nous sommes dans la colonie de vacances d’El Haouzia.

Une fois la porte principale franchie, se dresse devant nous une tente destinée à accueillir les parents d’enfants venus passer leurs vacances d’été loin de la monotonie des grandes villes. C’est par le biais de plusieurs associations et dans le cadre de la troisième phase du programme «Vacances pour tous», mis en place par le ministère de la Jeunesse et des Sports, que ces jeunes ont eu l’opportunité de séjourner à quelques kilomètres des rives de l’Atlantique.

Les jeunes vacanciers sont accueillis dans l’un des 74 chalets du centre qui comprend également une salle d’informatique, un réfectoire, et propose aussi des activités pédagogiques. D’autres bâtiments sont amenés à sortir de terre dans le but d’augmenter la capacité d’accueil du centre d’El Haouzia, qui accueille entre 1.200 et 1.500 enfants selon les périodes.

Au cœur du centre, une piscine occupe l’espace. Mais à quelques pas de la plage, les enfants n’ont d’yeux que pour l’océan. Car certains d’entre eux n’ont jamais vu la mer de leur vie. C’est également devant l’océan que les enfants se préparent à faire leurs adieux à leurs parents avant une séparation de 12 jours.

La peur des premiers jours

Des deux côtés, la séparation est difficile à gérer. D’après les instructeurs du centre, ce sont les trois premiers jours qui sont les plus difficiles. L’intégration débute à peine pour ces enfants qui, pour la plupart, ont moins d’une dizaine de printemps et prennent part pour la première fois à une colonie de vacances.

Pour faciliter cette intégration, chacune des associations qui participent au projet «Vacances pour tous» a sa propre méthode. «Nous les préparons au préalable dans nos différents centres au Maroc près de deux mois à l’avance. Psychologiquement, ils sont prêts à rester loin de leurs familles», nous explique le représentant de la Fédération du scoutisme marocain présent à Azemmour.

D’autres associations apprennent à tisser des liens avec les enfants dont ils ont la charge sur place, en préparant un discours personnalisé pour chacun. « Le deuxième jour, trois enfants s’apprêtaient à quitter le camp, valises en main. J’ai dû les convaincre de l’importance de leur passage ici et leur parler de toutes les choses qu’ils allaient apprendre et pouvoir partager avec leurs familles à l’issue des colonies de vacances», nous raconte Zineb, vice-directrice pédagogique de l’Observatoire de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme, et volontaire au centre.

Au-delà des frontières

L’apprentissage est d’autant plus riche que les enfants de la colonie de vacances ne sont pas tous Marocains. Dans le cadre d’un programme commun mis en place avec le ministère des Affaires étrangères, des jeunes venus de Palestine, du Yémen, de la Syrie et du Sénégal partagent la même colonie de vacances. «Je suis très content d’être là parmi tous ses enfants», confie un jeune Yéménite âgé de 14 ans.

«J’ai appris beaucoup de choses ici, dont le fait de ne compter que sur moi pour ranger mes affaires et surtout d’être sociable», ajoute cet écolier qui tient à remercier ses amis marocains. «Je suis Marocain, Sahraoui», nous répond en darija un jeune Sénégalais lorsque nous l’interrogeons sur son intégration.

Des activités collectives sont organisées pour souder ce groupe hétéroclite. Lors d’une soirée, à laquelle nous avons pu assister, les vacanciers ont notamment été invités à parler de leur ville ainsi que de la culture de leur lieu de résidence. L’objectif de ces activités : resserrer les liens à un moment où certains parents craquent.

Merci Papa, merci Maman

Ce sont finalement eux, les parents, les plus turbulents. «Certains parents attendent moins de 24 heures pour revenir au centre», nous affirme Abdelaziz Elhmer, le directeur du centre. Une attitude qui, même si elle a pour but de rassurer l’enfant, ne favorise pas son adaptation à son nouvel environnement. «Ce n’est pas bien pour leurs enfants, car ils commencent à se poser des questions, à douter», affirme l’éducateur.

Pour faciliter la séparation entre parents et enfants, la direction du centre a adopté une mesure draconienne. «Les téléphones sont interdits aux enfants pendant les trois premiers jours du camp», nous fait savoir Hicham, un directeur pédagogique et enseignant de mathématique dans un collège de Laayoune.

Alors que les enfants finissent par se plier à cette consigne, leurs géniteurs ont plus de mal à décrocher. «Parfois nous devons plus gérer les parents que les enfants», raconte Zineb, qui précise que pour les calmer un groupe Whatsapp a été créé pour leur permettre de recevoir des photos et vidéos des enfants en temps réel.

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