Othman Benjelloun tente de rassurer sur le mégaprojet Tanger Tech, mais des zones d'ombre subsistent

Jeudi 27 juillet, Othman Benjelloun a de nouveau tenté de démontrer  la viabilité du projet de la cité Mohammed VI Tanger Tech au siège de la BMCE, en présence du ministre de l'Industrie et d'une délégation chinoise.

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Othman Benjelloun, président du Groupement professionnel des banques marocaines. Crédit: AIC Presse

« BMCE Bank Of Africa, à l’occasion des projets majeurs que nous menons ensemble, pourrait s’appeler tout autant BMCE Bank Of China« . C’est par ces mots très symboliques que le président de la BMCE, Othman Benjelloun, promoteur du projet Tanger Tech, a accueilli la délégation chinoise composée d’un membre du conseil d’administration du groupe Haite, de représentants du gouvernement chinois et de grands groupes privés multisectoriels.

À grand renfort de rappels sur la « relation historique sino-marocaine » et d’anecdotes de Benjelloun sur sa première visite au président Mao Zedong en 1971, l’objectif est clairement affiché: attirer des entreprises chinoises dans la cité industrielle en devenir.

Crédit: AIC Presse
La maquette de la Cité Mohammed VI Tanger Tech, présentée à l’issue de la conférence de presse animée par Othman Benjelloun et Moulay Hafid Elalamy. Crédit: AIC Presse

« L’optimisme allié au pragmatisme » d’Othman Benjelloun

Alors que des doutes avaient été émis sur la capacité du groupe chinois Haite à réaliser un projet d’une telle ampleur, le président de la BMCE a adressé une critique à peine voilée aux médias, en évoquant « un monde où la profusion et l’instantanéité de l’information brouillent, parfois, notre lucidité et l’intelligence des situations ».

Il s’est même adressé directement aux représentants des médias:  » il est important que vous soyez, aujourd’hui, témoins de notre mobilisation sans réserve pour voir éclore la Cité Mohammed VI Tanger Tech ».

Il a martelé son mot d’ordre: la confiance. « Confiance dans le leadership royal, dans le sérieux des parties prenantes, confiance en nous, Marocains (…) au-delà de tous les moyens que ce projet de longue haleine va devoir mobiliser sur la décennie, de tous les textes législatifs et réglementaires, des montages financiers, des business plans et autres travaux pour structurer la multitude de projets« . Mais justement, de quels éléments concrets dispose-t-on à ce stade ?

Des chiffres déjà connus et beaucoup d’inconnues

Le projet est porté par deux investisseurs de référence: Haite Group, chef de file d’un groupe d’investisseurs chinois et BMCE Bank of Africa, chef de file pour les investisseurs marocains. Si le président de la BMCE n’a pas souhaité révéler le tour de table, il affirme en revanche recevoir « tous les jours des propositions de sociétés chinoises parmi les plus importantes au monde ».

Une holding qui aura pour mission de réaliser tous les investissements, baptisée SA TT pour « Société d’Aménagement Tanger Tech », a été créée. Elle comprend deux filiales, destinées à la zone industrielle et à la zone commerciale et résidentielle. Un milliard de dollars seront nécessaires pour la construction, tandis que les investissements industriels totaliseront 10 autres milliards.

Cette cité industrielle abritera 300.000 habitants dont 100.000 travailleurs répartis – en plus du secteur des services – dans 10 secteurs industriels : aéronautique, automobile, e-commerce, télécommunication, énergies renouvelables, transport, électroménager, équipements pharmaceutiques, production de matériaux, industrie agroalimentaire, rappelle Benjelloun.

Elle s’étendra sur 2.000 hectares et sera réalisée en 3 phases. La première, de 500ha, sera destinée à l’industrie. La seconde (700ha) sera destinée aux services, tandis que la troisième (800ha) sera résidentielle. Cependant, l’emplacement exact n’est pas encore déterminé à ce stade.

carte tanger tech

Le projet doit être finalisé dans 10 ans, mais « si c’est 11 ou 12 ans, on pourra aussi être satisfait« , estime Othman Benjelloun. Si la première usine doit être opérationnelle d’ici 2 ans, le ministre de l’Industrie Moulay Hafid Elalamy n’a pas pu nous préciser son identité ni même le secteur industriel concerné.

« Nous avons énormément de demandes, nous devons sélectionner les industriels en fonction de trois critères: la création d’emploi, l’amélioration du PIB industriel et les exportations ». La première phase industrielle « prendra beaucoup de temps, elle sera la plus longue« , précise le ministre qui ne nous donne pas plus de précisions.

Un investisseur chinois peu loquace

Othman Benjelloun s’est dit « heureux d’accueillir une délégation chinoise aussi nombreuse« . Le président du groupe Haite, Li Biao, brillait quant à lui par son absence, s’étant contenté d’enregistrer une vidéo dans laquelle il a vanté les « 39 ans d’expérience de réforme économique et d’ouverture de la Chine » de son groupe.

Un administrateur du groupe chinois, d’abord réticent ou timide, a fini par prendre la parole pour préciser que le groupe Haite est « en train de travailler sur un plan d’urbanisation » et doit également « travailler avec le ministre pour voir quelles entreprises chinoises pourront venir s’implanter ».

Du reste de la délégation, nous saurons simplement qu’il s’agit de représentants des autorités gouvernementales chinoises et de grands groupes privés multisectoriels, sans plus de précisions.

Interrogé par nos soins sur l’affaire « Whitestones » révélée par nos confrères du Desk, (Haite aurait remplacé le cabinet de conseil Whitestones avec qui un montage inédit aurait été finalisé auparavant), le ministre de l’Industrie nous a répondu de manière lapidaire: « Whitestones n’est absolument pas dans le décor de ce sujet et ne l’a pas non plus été au début« .

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