Pour la Cour des comptes, le ministère de la Culture manque cruellement de vision

Les magistrats de la Cour des comptes ont déploré la léthargie du ministère de la Culture, à qui ils reprochent, entre autres, de ne jamais avoir élaboré de véritable stratégie culturelle.

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Mohamed Amine Sbihi, Crédit : Yassine Toumi

Manque de vision, gabegie financière, insuffisances en matière de protection du patrimoine culturel… Les reproches adressés au ministère de la Culture par la Cour des comptes sont légion. Dans son rapport concernant l’année 2015 ,présenté le 24 avril, l’instance dirigée par Driss Jettou commence par épingler le manque de vision d’un ministère qui n’a à ce jour pas élaboré de véritable stratégie culturelle. La cour recommande au département chapeauté à l’époque par Amine Sbihi « d’élaborer une stratégie culturelle pluriannuelle, fixant les priorités, les programmes qui leur sont subordonnés et les cibles à moyen et long termes ».

Absence de suivi

Autre reproche adressé au ministère de la Culture: l’opacité qui caractérise l’octroi des subventions aux associations. L’on apprend ainsi qu’entre 2005 et 2013, le département a subventionné 826 associations pour un montant avoisinant 46 millions de dirhams. Pourtant, « depuis la mise en place de cette action, aucune évaluation de l’activité de soutien n’a été réalisée ». Pire encore, « les PV des commissions chargées d’étudier les demandes de subvention ne précisent ni le nombre de dossiers déposés, ni la liste des associations écartées, ni les motifs » de leur mise à l’écart, peut-on lire dans le rapport.

Ces derniers se sont également intéressés au patrimoine culturel géré par le ministère. Un patrimoine qui souffre d’un « faible effort d’inscription et de classement « , estime la Cour des comptes. De cette étude, ressort un chiffre pour le moins ahurissant: le nombre de monuments classés lors de la période coloniale s’élève à 263, contre seulement 48 depuis l’indépendance. Un faible chiffre que la Cour des comptes impute au changement de la législation après l’indépendance. La procédure d’inscription et de classement ayant changé depuis. La législation actuelle prévoit que la procédure de classement des monuments « ne peut aboutir que si les demandes d’inscription et de classement émanent d’un tiers« .

Protection insuffisante des monuments

La cour reproche également au ministère de la Culture de ne pas suffisamment protéger les monuments. Outre la « non-élaboration des rapports relatifs aux infractions de sauvegarde et d’entretien des monuments historiques« , la cour met en lumière les défaillances du système de sécurité des monuments historiques tout en listant un certain nombre d’incidents, dont le vol d’une porte d’un monument historique à Fès ou encore la démolition d’une partie des remparts de Tiznit.

Pour remédier à toutes ces défaillances, la Cour des comptes recommande notamment au ministère de « procéder au classement et à l’inscription du plus grand nombre des monuments historiques recensés« , ou encore de « réaliser les projets de restauration et de valorisation des monuments historiques dans les délais normaux« .

Pas d’enseignement musical

Selon l’instance dirigée par Driss Jettou, le département désormais dirigé par Mohamed Laâraj « ne dispose pas d’une vision globale et cohérente de l’enseignement musical au niveau national susceptible d’unifier, de coordonner et d’harmoniser les actions des opérateurs opérant dans ce domaine« .

La cour a également soulevé plusieurs défaillances dans la gestion du corps professoral dans divers conservatoires, reprochant au ministère son manque de contrôle sur des professeurs qui n’assurent pas leur charge horaire hebdomadaire réglementaire, fixée à 22h, mais qui n’hésitent pas à dispenser des heures supplémentaires.

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