Que fait le Maroc pour lutter contre l’évasion fiscale?

L’évasion fiscale accompagne la fuite des capitaux marocains à l’étranger. Mais que fait l’Etat pour attraper ses fraudeurs ?

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Les bureaux de HSBC à Hong Kong, considéré comme un paradis fiscal. Crédit : Baycrest/Flickr.

En moyenne, 40,4 milliards de dirhams sortent chaque année illégalement du Maroc. D’après le dernier rapport de l’ONG américaine Global financial integrity, le royaume est très mal classé en matière de fuites de capitaux. Or, cet exil s’accompagne dans certains cas avec de l’évasion fiscale.

L’évasion fiscale, c’est quoi ?

La loi marocaine ne définit pas ce qu’est l’évasion fiscale, ni la fraude. Cette dernière est évoquée dans l’article 187 du Code général des impôts nommé « sanction pour fraude ou complicité de fraude », mais aucune définition n’est précisée, même s’il est admis qu’elle correspond à une soustraction illégale à l’impôt. L’évasion se situe entre la fraude et l’optimisation (réduction légale de la charge fiscale), elle consiste à déplacer le patrimoine ou l’activité taxée dans un autre pays, où les impôts sont moins élevés, notamment grâce à des montages financiers complexes. Elle peut être pratiquée par des personnes ou des entreprises. Selon les lois en vigueur, elle n’est pas nécessairement illégale.

D’après les chiffres de la Direction générale des impôts, l’évasion n’est pas la pratique la plus répandue. Au Maroc, le plus gros de la fraude consiste à sous déclarer ses revenus. 67 % des fraudeurs minorent le chiffres d’affaires de leur entreprise.

Qui est en charge de lutter contre ?

La Trésorerie générale du royaume (TGR) est chargée du recouvrement des finances publiques, qui porte entre autres sur l’impôt sur le revenu. Ensuite, c’est la Direction générale des impôts (DGI) qui est chargée de repérer les actes de fraude et d’évasion fiscale. Environ 16 % des effectifs de la direction sont affectés à ce contrôle, parmi lesquels 77 % des personnes sont des inspecteurs vérificateurs, soit 630 agents (chiffres de 2006).

Bien sûr, pour lutter contre un phénomène, la répression ne suffit pas toujours. Ainsi, dans ce cas là, les économistes d’inspiration libérale réclament une baisse des impôts au Maroc, évoquant la « pression fiscale » du pays. Ils supposent ainsi que s’il y avait moins d’impôts, les Marocains déposeraient moins leurs revenus à l’étranger.

Ainsi, indirectement, l’Office des changes est aussi chargé de lutter contre l’évasion. L’institution pilote un projet de libéralisation des changes, censé inciter les Marocains à placer leurs capitaux au Maroc.

Miser sur la collaboration internationale

Le Maroc signe régulièrement des conventions bilatérales en la matière. La première date de 1971 et concerne la France. Plus récemment, le royaume s’est lié à l’Albanie, l’Arabie saoudite, le Gabon ou encore la Grèce. Ces conventions concernent « la double imposition et la prévention de l’évasion fiscale de l’impôt sur le revenu ». On en compte plus de cinquante au total, mais elles restent d’ordre assez général et ne précisent pas forcément les moyens concrets mis en place pour échanger des informations.

En revanche, en 2013, le Maroc a signé la convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale de l’OCDE. Elle n’est pas encore entrée en vigueur mais d’après la convention, le Maroc peut demander l’aide de tout État signataire pour trouver des informations sur un contribuable qui ne s’acquitterait pas de ses impôts, et vice-versa. Les États peuvent aussi communiquer de manière spontanée des informations à d’autres pays, s’ils ont des présomptions sur une personne. Et là, le texte détaille davantage les moyens de mise en œuvre de cette collaboration.

Lire aussi : Pour traquer les fraudeurs, le fisc devrait bientôt coopérer avec les pays étrangers

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