Zakaria Boualem refait les élections

Par Réda Allali

Les élections sont passées al hamdoullilah. Zakaria Boualem a fait de son mieux pour suivre cette affaire de près, mais il faut être lucide : il n’a pas le niveau. Un peu comme ces gens qui s’intéressent au foot à chaque Coupe du Monde et qui se trouvent perdus lorsque des spécialistes débattent des vertus du milieu en losange.

Il a été complètement largué lorsque le second tour et ses ténébreuses transactions se sont présentées. Il a un peu regardé les chiffres et compris que le PAM avait gagné, même s’il a été créé pour contrer le PJD qui a encore plus gagné, et il a aussitôt renoncé, dans un état d’épuisement total. C’est une affaire assez complexe pour les débutants comme le Boualem. Ce qui a été bien plus réjouissant à observer, c’est le spectacle de certains internautes qui ont mis en scène leur vote comme s’ils disposaient d’une voix au Conseil de sécurité de l’ONU. Certains ont même poussé le sens de la précaution jusqu’à souhaiter lire le programme de tous les partis avant de faire leur choix. Cette méticulosité les honore.

On se demande bien quel état de confusion mentale peut pousser des gens à s’intéresser au programme du RNI, par exemple. Il paraît qu’ils ont mis dedans qu’ils voulaient organiser les Jeux Olympiques à Casablanca (merci au secrétariat de rédaction de placer ici les petits rires enregistrés des sitcoms du ramadan). C’est une proposition qui porte en elle une charge suffisante de ridicule pour annihiler toute tentative de plaisanterie supplémentaire. On peut la ranger dans la même catégorie que cet étonnant clip du PJD où on nous expliquait qu’il s’agissait de donner à Kénitra une dimension mondiale, bon.

Mais ceci n’est pas grave (rien n’est vraiment grave chez nous). Il y a au contraire quelques bonnes nouvelles, comme la défaite spectaculaire du maire de Fès, un moustachu féru de numérologie dont on ignore par quelle succession de malentendus il est parvenu à se hisser à ce poste. On parle d’un individu qui expliquait à la presse, en 2012, que le nombre de voix qu’il a obtenues pour gagner la tête de son parti, 478, était obtenu « en multipliant le nombre de votants (936) par 23 (23 septembre, le jour du vote), puis en divisant la somme obtenue par 9 (mois de septembre), puis par 5 (mai, le mois de la fête du travail) ». Là encore, ce n’est pas une plaisanterie. Il est désormais clair que nous sommes en train de payer une faute collective importante, un truc dégueulasse qu’ont dû faire nos ancêtres, pour devoir se farcir des personnages de cet acabit. Mais la bonne nouvelle, encore une fois, c’est que ces puissants calculs ne l’ont pas empêché de se prendre une monumentale gamelle, il a dû se planter sur une division quelque part le pauvre!

Tout n’est pas perdu, donc, nous remontons la pente, c’est incontestable. Preuve supplémentaire de la bonne période que nous traversons, cette éclatante victoire des Lions de l’Atlas à Sao Tomé sur le score impressionnant de 3-0. Les éternels insatisfaits noteront que la faible population de Sao Tomé, moins de 200 000 habitants, et le prestige incertain de sa sélection devraient imposer un peu de retenue dans la célébration de cet exploit. Les plus grognons expliqueront que si on enlève les femmes, les bébés et les vieillards, nous avons battu une population de 15 000 personnes environ, c’est la taille de la tribune populaire du Raja. Laissons-les geindre tout seuls et célébrons, de notre côté, cette rentrée glorieuse, qui ouvre des perspectives faibles mais incontestables de dissipation des ténèbres.

Oui, Zakaria Boualem pense que nous allons y arriver, et, normalement, lorsqu’il est dans cet état d’esprit, le Maroc Moderne prend une de ces décisions déprimantes dont il a le secret. Nous espérons y échapper cette fois. Que Dieu Nous Glorifie, et merci.