Coca-Cola écrase toujours la concurrence dans le marché du soda

Soda. Dans un marché qui représente 5,5 milliards de dirhams, Coca-Cola règne en maître. Les concurrents internationaux ou les challengers locaux ont du mal à suivre.

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Photo : DR

Zone industrielle Azli à Marrakech, nous sommes dans l’usine de la Compagnie des boissons gazeuses du sud (CBGS), un des quatre embouteilleurs de Coca-Cola Company au Maroc. Sur une chaîne ultramoderne, des centaines de bouteilles glissent d’une machine à l’autre avant d’arriver en bout de chaîne devant un robot qui joue au domino pour empiler et emballer des palettes géantes. « Près d’une boisson sur cinq vendue par Coca-Cola au Maroc sort de cette unité, nous explique Samira Nabil, plant manager à la CBGS, qui nous fait la visite guidée. Elles transitent par nos sept centres de distribution avant d’être acheminées vers les quelque 20 000 points de vente de notre territoire ».

La limonade, on en trouve effectivement partout : précisément dans 131 157 épiceries, grandes surfaces, cafés, hôtels ou snacks en tout genre. « Populaire comme une marque de soda » est une formule qui prend tout son sens quand on examine les données de la très discrète Association marocaine des boissons : 72% des consommateurs appartiennent aux catégories socio-professionnelles D-E et au monde rural, 62% des ventes se font dans un format familial, 87% des acheteurs sont des familles nombreuses composées de plus de quatre personnes. Et avec 85 verres de boissons gazeuses par an et par habitant, le Marocain reste toujours moins porté sur la « gazouza » que l’est un Algérien ou un Tunisien. C’est dire que le marché regorge encore de potentiel.

Leader et challengers

Dans ce secteur pétillant qui pèse 5,5 milliards de dirhams de chiffre d’affaires, Coca-Cola Company se taille la part du lion. Avec ses sept marques (totalisant une gamme d’une vingtaine de produits), elle contrôle 90% de parts de marché. Pepsi, son éternel rival, fait tant bien que mal pour essayer de rattraper son retard. Car la multinationale avait longtemps abandonné le Maroc avant d’y revenir il y a moins d’une décennie à travers la Société des eaux minérales d’Oulmès. Sauf que celle-ci, en manque de cash en 2011, a dû revendre cette carte (pour la coquette somme de 100 millions de dollars) à la filiale de l’embouteilleur mondial de Pepsi, Ravun Beverages. Autre challenger local dans le marché du soda, la compagnie Sodalmu (filiale du holding Sanam), qui a misé dans les 100 millions de dirhams pour mettre sur le marché sa marque Ice. Pour Mohamed Maghrabi, secrétaire général chez Sanam Holding, il n’est pas question de concurrencer les géants américains. « Nous ne nous positionnons pas sur le même marché, nous sommes sur une niche et une politique de prix et de gammes différentes », nous explique-t-il.

Le secret du leadership de la firme d’Atlanta sur le marché marocain se résume en une phrase : innovation régulière et qualité permanente. Dans l’usine de Marrakech, la qualité se voit d’ailleurs au niveau de la modernité de cette unité qui tourne depuis 1968 et qui collectionne aujourd’hui les certifications. Outre la nouvelle chaîne de bouteilles en plastique, qui a nécessité près de 70 millions d’euros d’investissements, les deux anciennes lignes qui produisent les bouteilles en verre sont souvent customisées pour retrouver une nouvelle jeunesse. Exemple : ce scanner performant qui coûte 3 millions de dirhams et qui décèle la moindre anomalie dans les bouteilles une fois remplies et scellées. Autre exemple : une station pour traitement des eaux usées qui permet, entre autres, de recycler cette ressource de manière à réaliser des économies significatives. « Nous sommes passés de 3,8 litres d’eau pour la production d’un litre de soda à 1,8  litre seulement grâce à cette installation notamment », nous confie Samira Nabil.

Un marketing agressif

L’innovation est aussi perceptible au cœur de la chaîne de production. Aujourd’hui, la ligne de production tourne à plein régime, soit 25 000 caisses par heure, pour des bouteilles de Hawaï Pina Colada, le dernier-né des produits Coca-Cola. « Nous venons de le mettre sur le marché pour enrichir notre gamme Hawaï, une marque présente dans le cœur des Marocains », nous  explique Omar Bennis, PAC manager de Coca-Cola Moyen-Orient et Afrique du Nord. La marque Hawaï, héritée du portefeuille SIM racheté par la firme américaine au début des années 1990, est effectivement la deuxième marque de soda la plus vendue au Maroc après Coca-Cola. Sa forte notoriété lui a même valu récemment une séquence de  minutes dans un reportage de la prestigieuse Travel Channel, consacré à la gastronomie du royaume.

Dans l’aire de stockage de l’usine, on peut également apercevoir les rouleaux des nouvelles étiquettes habillant les bouteilles de soda produites cette saison. Elles tiennent compte du nouveau jeu-concours lancé par la marque permettant de gagner un voyage au Brésil pour assister à une rencontre de Coupe du Monde. Coca-Cola est effectivement sponsor officiel du Mondial 2014, alors quasiment toutes ses filiales dans le monde profitent de l’événement pour mettre le paquet sur le marketing. « Effectivement, nous comptons sur cette campagne pour atténuer l’effet ramadan qui a un impact non négligeable sur nos ventes en cette haute saison », assure Omar Bennis.

Lancer des campagnes en continu avec souvent des avantages aux clients et investir massivement dans la publicité restent ainsi des atouts de Coca-Cola Company pour conserver son statut de leader incontesté sur le marché. « Notre budget marketing représente en moyenne 40 % de l’investissement total. Et nous dépensons en moyenne de 15 à 17 millionsde dirhams dans les spots télé », confie le directeur de communication, qui ne va pas jusqu’à dévoiler le secret de fabrication du mythique sirop noir inventé dans une officine.

Consigne. La culture du « khawi »

Un dirham pour la petite bouteille, deux dirhams pour la grande… l’arrivée du plastique et des canettes n’a pratiquement rien enlevé au succès populaire du soda en bouteilles de verre. Economiques pour le consommateur, elles sont aussi des plus rentables pour les embouteilleurs. D’une part, les chaînes de production sont assez anciennes et donc largement amorties même si des investissements sont toujours nécessaires pour les maintenir à niveau en termes d’exigences de qualité. D’autre part, les bouteilles de verre peuvent être utilisées jusqu’à sept fois. Les petites gravures en bas des bouteilles donnent d’ailleurs une indication sur le nombre d’usages et les scanners intelligents de la chaîne rejettent automatiquement les contenants ayant subi une détérioration. « La compagnie ne badine pas avec la qualité, nous explique Samira Nabil, plant manager à CBGS. Il y a trois mois, nous avons subi une inspection surprise de la part des redoutables auditeurs de Coca-Cola. Eux, quand ils relèvent la moindre défaillance, ils ne se posent pas de question : c’est la fermeture directe de l’unité ». 

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