Zakaria Boualem et la baraka brésilienne

Par Réda Allali

Zakaria Boualem a passé une grosse journée de foot, cette Coupe du Monde est décidément une bénédiction. Il est en immersion totale. De temps en temps, il voit passer la déclaration d’un de nos glorieux responsables, immanquablement suivie d’une polémique qui génère une contre polémique, le tout enrichi par quelques liens avec des vidéos à l’image terne et des titres enflammés, mais il ne clique jamais. Il s’en fout, faîtes ce que vous voulez, c’est la Coupe du Monde et merci. Il est d’ailleurs peu probable que vous parveniez à régler des problèmes majeurs en cette période chargée, mais personne ne vous en voudra d’essayer, bien entendu.
Le Brésil s’est qualifié, donc, grâce à une espèce de baraka qui, si elle s’était abattue avec la même intensité sur une équipe musulmane, aurait été aussitôt reprise sur facebook pour convaincre les infidèles de jeûner dès ce matin. Cette équipe fait un peu de peine, elle joue la trouille au ventre, bafouille son football, attend les pénos comme une vulgaire Grèce… Et seule la barre transversale a empêché le Chilien Pinilla de s’inventer à la dernière minute un destin de fossoyeur de rêves auriverde.

La FIFA, le gouvernement brésilien et tous les spectateurs neutres sur place la remercient chaleureusement, cette barre transversale, elle vient de sauver la Coupe de Monde. Car il est bien possible qu’en cas d’élimination, on aurait demandé au Qatar d’organiser la suite de la compétition pendant que les Brésiliens soignent leur dépression collective. En quart de finale, ils devront se farcir les colombiens. Magnifique, cette Colombie, sur le terrain comme dans les tribunes. Zakaria Boualem les trouve rapides, inspirés, précis, ils ont l’air d’être plus nombreux que leurs adversaires dans toutes les zones du terrain, c’est un prodige. Le premier but de James Rodriguez est une merveille d’équilibre, d’enchaînement, de sens du rythme. La gestuelle parfaite, c’est juste dommage que ce vilain maillot gâche la beauté de la chose.

Impossible de terminer ce modeste compte rendu sans évoquer Suarez, dont l’ombre a pesé sur ce match. Privé de leur combattant en chef, les Uruguayens avaient l’air d’avoir rétréci. Le bonhomme a été banni de toute activité lié au football pour quatre mois. Il ne peut même pas aller dans un stade voir son équipe jouer, vous apprécierez le sens de la mesure de la FIFA, toute heureuse de s’offrir un rôle de gardien de la morale sportive qui lui va aussi bien qu’un pantacourt au Guercifi. Certes, Suarez est un peu fou, on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il devrait être possible de se retenir de mordre sans grand effort, mais c’est cette folie qui en fait ce qu’il est. Le genre de footballeur pour lequel on allume sa télé. On connaît des types qui ont cassé des jambes volontairement et qui ont subit un lynchage moins féroce. La palme revenant à cet équipementier sportif, sponsor du joueur, qui n’a pas pu se retenir de porter à l’attention du public qu’il s’abstiendra de communiquer sur Suarez pendant la durée de la Coupe du Monde. Ils ne pouvaient pas se contenter de ne pas communiquer sur Suarez pendant la durée de la Coupe du Monde, ces hypocrites. Non, ils devaient le faire savoir, et donc utiliser Suarez pour dire qu’ils n’utiliseraient pas Suarez. Magnifique.
Allez, à demain.