Des étudiants en mode à Casa rêvent de carrière internationale

Les étudiants de l'école de mode de Casablanca, semi-publique, présentaient leurs collections le 13 juin. Un tremplin professionnel vers l'étranger pour les passionnés de mode du Maroc.

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"Mélancolia Dolls", par Siham El Amri © Louis Witter / TelQuel

Au milieu des portants remplis de vêtements, des machines à coudre et des mannequins qui reçoivent leurs dernières retouches, ils courent partout. Ces petites fourmis aux airs de Shiva sont les étudiants de la Casa Moda Academy (CMA), seule école publique du pays à former aux métiers de la mode. Certains d’entre eux, en dernière année de formation, s’apprêtent à présenter leur propre collection devant le gratin de la mode marocaine (et pas seulement). De l’autre côté du mur, industriels, artistes, journalistes de mode, sont en effet au même moment en train de s’installer le long du podium. Parmi eux, le créateur Amine Bendriouich, directeur artistique du défilé, ou encore le réalisateur Nour-Eddine Lakhmari.

Préparation des modèles en loges. Photo © Louis Witter / TelQuel
Préparation des modèles en loges. Photo © Louis Witter / TelQuel

Du beau monde qui pourrait en faire stresser plus d’un. Ce n’est pourtant pas le cas de Hamza Galmouss, âgé de seulement 19 ans :

Il ne faut surtout pas stresser et faire avec le flow. La clef, c’est de respecter l’organisation prévue et prendre soin de son mannequin.

Dans quelques minutes, il présentera une pièce de la collection de deuxième année sur le thème imposé « petite robe noire et détail fluo ». Originaire de Rabat, il regrette que sa maman ait raté son train pour venir assister au défilé réservé aux proches, dans l’après-midi. Comme la plupart des élèves, il est largement soutenu par sa famille. « J’avais pris une option art appliqué au lycée déjà. Je suis né pour faire ça. Je n’aurais rien pu faire d’autre ! », nous confie t-il.

Hamza, étudiant en deuxième année à Casa MODA Academy © Louis Witter/ TelQuel
Hamza Galmouss, étudiant en deuxième année à Casa Moda Academy © Louis Witter/ TelQuel

Canaliser l’envie de provoquer

Les étudiants de cette école sont loin de proposer des kaftans et des djellabas. Ici, très peu de place pour le traditionnel. « Certains se rebellent et veulent tout changer au Maroc. Ils utilisent la mode comme moyen de provocation. Mais on essaye de les cadrer et de leur expliquer que la provocation n’est pas la seule manière de faire de la mode, que l’esthétique compte beaucoup », nous explique Dominique Savard, fondatrice d’une école en France et enseignante à la CMA.

L’école est née il y a 4 ans à l’initiative d’industriels du textile. Reposant sur un partenariat public/privée, elle est financée par l’Association marocaine des industries textile habillement et l’État marocain. « Mais nous sommes toujours en recherche de soutiens financiers pour pérenniser les activités et développer l’école », nous confie Fouad El Amri, le directeur général.

"Vertigo", de Meryem Zahidy © Louis Witter / TelQuel
Vertigo, de Meryem Zahidy © Louis Witter / TelQuel

Alors que Siham El Amri, étudiante de 30 ans en troisième année, nous explique l’origine de sa collection pour homme nommée Melancolia Dolls, alliant velours, fleurs et vichy : « Je m’inspire de quelque chose qui n’est pas beau pour en faire quelque chose de beau ».

Une voix retentit : « Ça commence ! Ça commence ! ». De l’autre côté du mur, la salle s’est remplie. L’excitation est à son comble, pour les spectateurs aussi. Costards cintrés, sarouels noirs, pantacourts look de baseball pour les hommes, robes de soirée sombres, chemises blanches flanquées de Homer Simpson ou encore jupes moulantes bleu turquoise pour les femmes : pendant presque une heure, les tenues défilent mais ne se ressemblent pas. A en croire Dominique Savard, il existe une véritable « Moroccan touch » :

Les Marocains ont un sens de la couleur extraordinaire, qui est assez rare en Europe où on ne manie pas très bien les couleurs.

"Crêpes à Mille Trous", de Myriam Eddahar © Louis Witter / TelQuel
Crêpes à Mille Trous, de Myriam Eddahar © Louis Witter / TelQuel

Exporter le style marocain à l’international

Suite aux longs applaudissements, l’événement se clôture alors par la remise des prix du jury. Parmi eux, celui du mérite. En première année, c’est la timide Hibat Allahe Nassim qui le reçoit. Étudier à la CMA est une véritable chance d’après elle :

C’est un autre monde pour nous. Alors c’est une joie d’être ici et de pouvoir faire défiler nos créations puis avoir l’opportunité de pouvoir bâtir une carrière.

Et le défilé du 13 juin était justement un moyen d’initier celle-ci. « C’est incroyable, l’Officiel Homme (magazine français de mode, ndlr) vient de me proposer un stage rémunéré après avoir vu ma collection ! » nous lance Siham, les larmes aux yeux.

A la rentrée, d’autres s’envoleront pour l’étranger, à l’image de Sarah Hakim qui fera un stage chez un designer américain ou encore de Selwa Elbakkal qui a reçu le prix Chardon Savard, lui permettant de compléter sa formation par un an de cours dans l’atelier parisien. Ces jeunes pourront donc distiller leur « style marocain » à travers le monde.

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