La France écarte (encore) l'Union africaine du dossier libyen

Paris a organisé une rencontre entre les représentants des gouvernements rivaux libyens sans convier le président congolais Denis Sassou Nguesso, haut responsable désigné par l'UA sur ce dossier.

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Denis Sassou Nguesso. AFP

« Pour nous, la solution de la crise libyenne ne passe pas par Denis Sassou Nguesso« . Selon ces propos rapportés par l’hebdomadaire Jeune Afrique, l’entourage d’Emmanuel Macron ne mise guère sur l’Union africaine dans la résolution du conflit libyen.

Lors d’une rencontre organisée la semaine dernière entre les deux principaux rivaux libyens, Denis Sassou Nguesso, président du comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, n’a pas été convié. Une absence qui en dit long sur la confiance accordée par l’hexagone à l’UA dans la recherche d’une solution à la crise qui secoue la Libye depuis 2011.

Cette réunion sous l’égide du président Macron visait à établir un dialogue entre Faïez Sarraj, le chef du gouvernement installé à Tripoli, et le maréchal Khalifa Haftar qui dirige le gouvernement de Benghazi, la grande ville de l’Est du pays.

Le 2 mai, les deux hommes s’étaient déjà rencontrés à Abou Dhabi sans parvenir à une déclaration de commune. Un accord de « paix et de réconciliation » proposé par l’ONU avait également été signé en juillet 2015 à Skhirat au Maroc, mais celui-ci avait été boudé par les représentants du parlement de Tripoli.

Informé, mais pas invité

« Le président Sassou n’a pas été informé par le président Macron, mais nous avons appris ce qui se tramait par divers canaux diplomatiques », déplore un dignitaire du Congo-Brazzaville dans les colonnes de Jeune Afrique.

Deux jours avant la rencontre, l’ambassadeur de France au Congo, Bertrand Cochery, avait pourtant été reçu par Denis Sassou Nguesso pour l’informer des attentes de cette rencontre. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a également prévenu le même jour le Guinéen Alpha Condé, président de l’Union africaine.

Face à la volonté du gouvernement français de ne pas convier le président congolais, son entourage se questionne :  « Peut-être voulaient-ils garder le secret sur ce rendez-vous pour ne pas prendre le risque qu’il échoue?« , s’interroge une source citée par Jeune Afrique.

Un secret pourtant bien mal gardé auprès de la présidence guinéenne. L’ambassadeur français ayant également dressé le bilan de la rencontre dès le lendemain, auprès du secrétaire général du ministère congolais des Affaires étrangères .

Vers un cessez-le-feu ?

Lors de leur rencontre à Paris, les deux hommes forts de la Libye se sont engagés, dans une déclaration commune, à « s’abstenir  de tout recours à la force armée pour ce qui ne ressort pas strictement de la lutte antiterroriste« .

Pour autant, le chemin vers une paix durable semble encore long. « Cet accord est une étape positive, mais il ne va pas tout régler d’un coup de baguette magique. Les chefs de tribus n’étaient pas présents, et la ville de Misrata échappe à tout contrôle« , nuance un dignitaire congolais.

Ce n’est pas la première fois que l’UA est écartée par la France sur le dossier libyen. En 2014, Jean Ping l’ex-président de la Commission de l’Union africaine avait déclaré au journal français l’Humanité que « les pays occidentaux n’ont pas laissé l’Union africaine “entrer” dans cette histoire libyenne« .

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