République centrafricaine : entre guerre civile et conflit intercommunautaire

Les attaques récurrentes contre les convois de la mission onusienne en République centrafricaine ont fait deux morts chez les Casques bleus marocains la semaine dernière. La Minusca, qui compte 752 soldats marocains, est aujourd'hui la seule à faire face aux groupes armés.

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Samedi dernier, une nouvelle attaque menée par un groupe armé non identifié a causé la mort d’un soldat marocain de la Mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations unies en Centrafrique (Minusca). Il s’agit du deuxième soldat marocain tué en une semaine, alors qu’une précédente attaque, perpétrée dans la soirée du 8 mai, avait déjà la mort de cinq Casques bleus, dont quatre Cambodgiens et un Marocain.

« C’est malheureusement l’attaque la plus meurtrière contre des soldats de la paix de la Minusca », indiquait alors le porte-parole de la mission, Hervé Verhoosel. De son côté, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a souligné que « les attaques contre les Casques bleus des Nations unies peuvent constituer un crime de guerre » et a demandé que les responsables soient traduits en justice.

Selon l’AFP, l’attaque du 8 mai est attribuée au groupe armé anti-Balaka. Depuis le début 2017, la recrudescence des violences en République centrafricaine (RCA) a poussé plusieurs organisations humanitaires internationales à suspendre leurs opérations dans ce pays de quatre millions d’habitants. Depuis plusieurs années, la RCA est régulièrement secouée par des coups d’État et des guérillas, en dépit de l’important dispositif des forces onusiennes mis en place.

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D’un coup d’État au conflit multicommunautaire

La crise actuelle a débuté en mars 2013, après le renversement du président François Bozizé par les rebelles de la Séléka, une milice insurrectionnelle d’obédience musulmane. Michel Djotodia, à la tête de cette coalition armée, se proclame alors président « pendant une période de transition consensuelle de 3 ans ». Mais l’incapacité du nouveau pouvoir à rétablir la sécurité dans le pays fait progressivement sombrer la République centrafricaine dans le chaos.

La crise dans ce pays qui compte 80% de chrétiens et 15% de musulmans vire alors au conflit confessionnel. Pillages, vols et violences entre chrétiens et musulmans deviennent le quotidien des habitants du pays. À l’automne 2013, des milices réactionnaires chrétiennes, les anti-Balaka, se forment en réponse aux violences armées perpétrées par les combattants Séléka. En décembre, des affrontements meurtriers ont lieu à Bangui. Ces violentes exactions menées par la milice au pouvoir, à dominante musulmane, contre les anti-Balaka ( à dominante chrétienne) font plus de 1.000 morts. Le Conseil de Sécurité de l’ONU vote alors une résolution en faveur d’une intervention française. Un mandat de désarmement des combattants et de protection des civils est confié conjointement à un contingent de 100 soldats français et à la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca, devenue Minusca).

Les Casques bleus en première ligne

Plus de 5.000 personnes sont mortes avec l’aggravation des violences, et une crise humanitaire sans précédent s’est déclarée. C’est dans ce contexte de guerre civile que la mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations Unies en Centrafrique (Minusca) a été créée en avril 2014 par le Conseil de sécurité des Nations unies. Sa mission: la protection des civils, le rétablissement de la sécurité et l’ordre public, la stabilisation du pays, et la mise en place des conditions propices à la fourniture d’une aide humanitaire aux populations.  Actuellement, sur les 12.870 membres déployés sur le terrain (10.750 militaires et 2.080 policiers), 752 soldats et 10 experts militaires sont Marocains. Au total, six Casques bleus marocains ont perdu la vie en Centrafrique depuis 2014.

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Déplacement massif de la population

Malgré le retour à l’ordre institutionnel en 2016, aucune instance n’a été capable d’arrêter la crise multidimensionnelle qui touche la République centrafricaine. L’opération militaire française Sangaris (de décembre 2013 à octobre 2016) et l’intervention des Nations unies ont permis la fin des massacres de masse, l’élection du président Faustin-Archange Touadéra et un retour au calme à Bangui. Cependant, dans l’intérieur du pays, des groupes armés se battent encore pour le contrôle des ressources. Ces violences ont mené au déplacement de 426.000 Centrafricains vers d’autres zones du pays, tandis que quelque 460.000 personnes ont dû se réfugier les pays voisins, notamment le Tchad, le Cameroun et la République démocratique du Congo.

Le Maroc dans les missions onusiennes

Le Maroc est engagé dans différentes missions de maintien de la paix de l’ONU pour lesquelles 1.598 Casques bleus marocains ont été déployés. Jusqu’en février 2017, quelque 700 Casques bleus étaient engagés aux côtés de l’Onuci (Côte d’Ivoire), et environ 800 sont actuellement dans les rangs de la Monusco (RDC).[/encadre]

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