Quand le Maroc a claqué la porte de l’OUA (archive)

12 novembre 1984. Hassan II annonce le retrait du Maroc de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), l'ancêtre de l'actuelle Union africaine (UA), en raison de l'admission de la RASD.

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Juillet 1979, les chefs d’États africains prennent part au sommet de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, ancêtre de l’UA) à Monrovia, au Liberia. C’est alors que Hassan II prononce cette phrase prémonitoire: « Ce qui se passe à l’OUA depuis des années sont des conférences tam-tam… des conférences de danse de Saint-Guy… je dois être isolé de ce cloaque… pour refaire cette Afrique, parce que l’Afrique est bien mal partie (…). L’OUA a besoin d’un assainissement sur le plan moral« . Cinq ans après ce discours, le roi claque la porte de l’organisation africaine, écœuré par l’admission de la RASD comme membre.

Depuis la Marche verte et la récupération du Sahara, suite aux accords de Madrid, le royaume a maille à partir avec ses homologues africains et se trouve considérablement isolé sur la scène continentale.

Coup de poker

En 1980, alors que la guerre s’enlise au Sahara, la question de l’admission de la RASD à l’OUA est ouvertement discutée lors du 17e sommet de l’organisation, tenu à Nairobi. Acculé, le Maroc fait tout pour retarder cette échéance. Hassan II tente un coup de poker lors du 18e sommet, tenu une année plus tard au Kenya, en proposant l’organisation d' »un référendum contrôlé » pour, explique-t-il lors de son intervention, « mettre un point final à ce problème du Sahara dans le cadre et dans l’éthique africains« . En réalité, le monarque ne fait que gagner du temps, la partie étant largement en faveur des séparatistes.

En février 1982, le secrétaire général de l’OUA, Edem Kodjo, décide d’admettre la RASD à une cession du Conseil des ministres de l’OUA. Une décision qualifiée de « hold-up et de brigandage juridique » par le Maroc, qui décide de jouer la montre.

Hassan II claque la porte

« Nous faisions tout pour retarder l’admission effective de la RASD au sein de l’OUA. Nous avions même réussi à faire avorter deux sommets », se souvient un diplomate marocain. Le Maroc avait effectivement réussi à bloquer deux réunions de travail de l’OUA en 1982 (réunion des ministres africains de l’Information en mars 1982 et réunion des ministres du Travail en avril 1982) et retardé le sommet de Tripoli, initialement prévu en août 1982, et qui aura lieu finalement en novembre de la même année. Mais le succès est de courte durée.

En juin 1983, lors du 19e sommet de l’OUA à Addis-Abeba, l’Algérie réussit à faire voter une résolution exhortant le Maroc et le Polisario à entreprendre des négociations directes. Une année plus tard, mécontent du rapprochement entre Hassan II et Kadhafi, le voisin de l’est fait ratifier par une large majorité de pays africains l’admission de la RASD au sein de l’OUA lors du 20e sommet de l’organisation panafricaine en novembre 1984.

À la tête de la délégation marocaine, le conseiller du roi Ahmed Reda Guedira demande la parole pour lire un message de Hassan II: « Voici l’heure de nous séparer (…) En attendant des jours plus sages, nous vous quittons. Mais africain est le Maroc, africain il le demeurera. Vous comprendrez aisément qu’en tant que membre fondateur de l’unité africaine, le Maroc ne saurait en être le fossoyeur ».

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