Zakaria Boualem et la déchéance de la nationalité française

Par Réda Allali

Bienvenue à vous, les amis, prenez place et n’hésitez pas à enlever vos chaussures, il n’y a aucune raison de tenter de maintenir un standing désuet alors que tout part de travers autour de nous. Détendez-vous, Zakaria Boualem va s’occuper de vous, du moins il va essayer. Le bougre est un peu perdu. Il vient de se farcir deux heures de débat sur une chaîne française, et est sur le point de se mettre à avaler des cailloux pour en finir plus vite. Rappelons qu’un débat français, c’est une poignée de gens autour d’une table qui produisent des phrases de bonne qualité, l’air pénétré de leur propre importance, et qui s’écharpent autour de la laïcité –forcément- en poussant des petits cris si on leur coupe la parole. Rappelons dans la foulée que la laïcité, c’est un truc un peu flou qui sert à cacher les musulmans sous un monceau de lois et quelques principes très flexibles. N’essayez pas d’en savoir plus, c’est tout simplement incompréhensible. Donc le Boualem, coincé chez des amis, a dû suivre un de ces débats pénibles. Il va vous dire ce qu’il en a retenu.

La France souhaite déchoir de leur nationalité les binationaux qui commettraient des actes de terrorisme. Plus clairement, un extrémiste écolo franco-suédois qui déciderait de faire sauter le métro parisien perdrait aussitôt son passeport français. Oui, ça à l’air un peu bizarre, il doit y avoir un problème avec l’exemple. Prenons-en un plus clair: un Franco-marocain qui déciderait de rallier les spectaculaires illuminés du levant deviendrait, par la grâce de cette loi, exclusivement marocain. Le bonhomme, qui n’a jamais mis les pieds chez nous, débarquerait donc pendant ses prochaines vacances en provenance de Syrie, les poches pleines de piastres durement acquises, pour se détendre un peu, après tout ce stress. Il ne pourrait plus aller en France sans demander de visa, le pauvre. Il se retrouverait privé de son droit à écouter Johnny Halliday chanter Charlie sur la place de la Bastille. Il est fort possible qu’il puisse avoir du mal à s’en remettre. Zakaria Boualem trouve cette idée de déchéance de nationalité très désagréable, voire vexante, et il va vous dire pourquoi.

  1. Il se trouve que nous disposons nous-mêmes d’un beau réservoir d’illuminés belliqueux. Il est donc inutile de nous en proposer de nouveaux. Zakaria Boualem, qu’on ne saurait pourtant suspecter d’indulgence vis-à-vis des dirigeants du Maroc Moderne, a du mal à leur coller une responsabilité quelconque dans la production de terroristes dans les banlieues européennes. Donc chacun se débrouille avec les siens, et merci.
  2. Il y a un côté vexant dans cette affaire. Voici comment Zakaria Boualem voit les choses. Un Franco-marocain est un terroriste, et soudain il devient marocain. Du coup, son statut de terroriste semble acceptable, puisqu’il n’est plus français. Ça sous-entend que son côté terroriste est forcément le marocain, en fait. C’est une humiliation insupportable.
  3.  Alors que la planète réclame plus de solidarité entre les États pour se débarrasser de cette insupportable mode terroriste, la France, très classe, nous explique que sa solution consiste à les déchoir de leur nationalité. Imaginez un peu. Vous avez une brebis galeuse dans la famille, elle vous colle la honte. Vous la supprimez de votre livret de famille en arrachant la page, et vous partez en sifflotant, l’air guilleret, comme si vous n’étiez plus concerné. Il y a un côté un peu surréaliste, presque marocain en fait, dans cette technique de résolution des problèmes.
  4.  Cette loi ne sert à rien, à part produire des débats affreux.

Voilà, c’était la page politique internationale de Zakaria Boualem, il doit bien vous avouer qu’il n’est pas totalement convaincu qu’elle soit pertinente. Mais, encore une fois, il ne voit pas au nom de quoi il devrait lutter pour maintenir un certain standing au moment où tout part de travers autour de lui, et merci.