Comment élaborer le règlement intérieur de son entreprise ?

Pause clope, discipline, indemnités... le règlement intérieur définit les moindres détails de la vie de l'entreprise. Mais il ne peut pas tout se permettre.

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Crédit : Pixabay.

Le Code du travail impose à toute entreprise de plus de dix salariés de se doter d’un règlement intérieur dans un délai de deux ans après sa création, sous peine d’une sanction de 2 000 à 5 000 dirhams. Le texte, élaboré par l’employeur, est censé organiser la société en précisant les droits et obligations des salariés. Le sujet a fait l’objet d’une conférence organisée par la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM) ce 31 mars. L’occasion de revenir sur l’intérêt concret d’un tel texte, la manière dont il doit être adopté, et son contenu.

A quoi sert un règlement intérieur ?

Le règlement intérieur permet d’organiser son entreprise et la cohabitation entre les salariés. « Le Code du travail ne prévoit que les grandes lignes. Le règlement intérieur permet de consigner sur mesure les problèmes », explique Nawal Ghaouti, qui a co-animé cette conférence à la CFCIM. En tant qu’avocate, elle ajoute : « S’il y a un problème, l’employeur doit fournir un champ de preuves au juge. Si on reproche quelque chose [à un employé] et que l’on souhaite sanctionner, il faut se baser sur un texte ». 

« [Le règlement intérieur] permet de renforcer la culture d’entreprise et la paix sociale », ajoute Hassan Laajaj, directeur préfectoral de l’Emploi et des affaires sociales pour la préfecture Aïn Chock-Hay Hassani-Nouaceur, qui a aussi animé l’événement.

Que doit-il contenir ?

L’article 139 du Code du travail énumère les clauses que le règlement intérieur doit obligatoirement contenir. Il s’agit des précisions relatives à l’embauche, au licenciement, aux congés, aux absences, à l’organisation du travail, à la protection de la santé et à la sécurité des salariés, aux mesures disciplinaires et aux dispositions pour la réadaptation des personnes handicapées suite à un accident du travail.

Mais ces clauses ne sont pas exclusives, et Nawal Ghaouti conseille d’en ajouter. De manière générale, les clauses essentielles sont celles liées à la discipline, puisqu’il s’agit du principal objet de différend. Il est donc conseillé de préciser clairement les règles en matière de retard, avec l’horaire d’arrivée, l’horaire toléré et l’horaire à partir duquel il y a une sanction, par exemple. Il est aussi bon de donner des précisions en matière d’absence inférieure à 24 heures ou de déplacement au sein de l’enceinte.

Plus il y a de précisions, mieux c’est, assure Nawal Ghaouti, qui s’est évertuée à donner des exemples concrets : « Beaucoup d’entreprises ont fixé les modalités des pauses café et des pauses cigarettes, elles fixent la durée des pauses, les lieux où il est interdit de stationner pendant celles-ci, instaurent l’obligation d’un renvoi d’appel pendant la pause… ». Il est bien aussi, ajoute-t-elle, que le règlement intérieur évoque la vidéosurveillance, le port de l’uniforme le cas échéant, l’interdiction éventuelle d’utiliser son ordinateur pour des tâches personnelles…

Le texte concerne normalement toute l’entreprise et comprend donc des dispositions d’ordre général et des dispositions particulières pour un établissement par exemple.

Ce que le règlement intérieur ne peut pas dire

Le règlement intérieur ne peut pas évidemment pas instaurer de clauses contraires à la loi. S’il évoque un point présent dans le Code du travail, il ne peut qu’instaurer une clause plus favorable au salarié, comme la mise en place d’indemnités supérieures à ce que prévoit le Code du travail, de périodes d’essai plus courtes, de limitation des sanctions disciplinaires. Il ne peut pas porter atteinte aux libertés syndicales ou instaurer des discriminations. Nawal Ghaouti évoque par exemple le cas de la Royal Air Maroc qui a pendant longtemps imposé une clause de célibat, finalement interdite par le juge. Il ne peut pas altérer l’égalité des chances, en prévoyant par exemple une formation professionnelle réservée à une certaine tranche d’âge.

Comment est-il mis sur pied ?

Nawal Ghaouti a pour habitude de conseiller à ses clients de partir des dossiers de contentieux et de se référer aux agissements des employés qui posent problème pour élaborer le règlement intérieur. Un arrêté de 2012 propose un document type pour les entreprises de moins de dix salariés. Il est conseillé de ne pas l’élaborer trop tôt après la création de l’entreprise, pour d’abord voir comment elle fonctionne. L’article 138 du Code du travail impose à l’entreprise de communiquer le projet du texte aux représentants du personnel. Mais il n’y a aucune obligation de négociation.

Le texte doit être approuvé par l’inspection du travail

Le règlement intérieur doit aussi être approuvé par l’inspection du travail lorsqu’il s’agit d’une entreprise de plus de dix salariés. Le texte doit être déposé à la direction préfectorale de l’emploi (DEP) avec accusé de réception. Mais Hassan Laajaj conseille d’envoyer le texte de manière informelle par email dans un premier temps, pour faciliter les retours en cas de grosses modifications.

La DEP est ensuite chargée de contrôler le fond et la forme, et n’étudie que la version arabe. En théorie, la DEP a deux mois pour approuver le texte mais en pratique, ce délai n’est jamais respecté et peut prendre plusieurs années. Le règlement intérieur doit ensuite être porté à la connaissance des salariés et être affiché dans tous les établissements de la société.

Lire aussi : Code du travail: ce que les patrons critiquent

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