Avortement: les avis divergent au sein du PJD

Alors que son n°2 s'est ouvertement déclaré favorable à une libéralisation de l'avortement (sous conditions), le PJD n’arrive pas à s'accorder sur une position claire et commune.

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Femme à l'hôpital- avortement
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Quelques jours après que le roi a transmis ses directives pour préparer une nouvelle législation sur l’avortement, le PJD s’est réuni le 19 mars pour débattre d’une position officielle du parti sur la réforme des articles 449 à 458 du Code pénal, qui sanctionnent lourdement la pratique de l’avortement (sauf si la vie de la mère est en danger).

Déjà, le 2 mars dernier, le président du conseil national du PJD, Saâdeddine El Othmani avait écrit une tribune sur le journal Al Massae dans laquelle il se disait favorable à l’avortement dans les cas de malformation du fœtus, de viol ou d’inceste. Un point de vue qu’il a défendu encore une fois lors de cette réunion du parti de la lampe, mais qui est loin de faire l’unanimité, comme l’explique le député du PJD Abdelaziz Aftati :

Le PJD est actuellement divisé. Entre ceux qui suivent l’avis de Saâdeddine El Othmani et ceux qui sont contre l’avortement. Cette question de l’avortement est spéciale pour notre parti et les solutions ne peuvent pas être présentées de manière catégorique.

Quid de la malformation fœtale

Lors de la réunion qui s’est déroulée au siège du parti, Saâdeddine El Othmani a rappelé sa position, exprimée dans sa tribune : dans la tradition malékite, « l’interruption de grossesse est interdite après 40 jours (6 semaines), sauf dans les cas de nécessité contraignante », ces dernières « devant faire objet d’un débat ». Il avait aussi cité une fatwa promulguée en 1990 à La Mecque par le Conseil de la jurisprudence de la ville, et stipulant « qu’avant 120 jours de grossesse, si des examens médicaux attestent que l’enfant à naître présente déjà des malformations de nature à rendre sa vie difficile et douloureuse, l’avortement est toléré, sur demande des parents ».

Parmi les intervenants lors de cette réunion, d’autres médecins du PJD se sont interrogés sur la possibilité de permettre l’avortement quand il s’agit d’un fœtus atteint de trisomie, d’un handicap physique ou mental. Ils ont demandé à ce que l’expression « malformation fœtale » soit définie avec exactitude dans le futur texte.

La réforme ne devrait pas passer par l’avortement

Cependant, d’autres Pjddistes s’opposent clairement à une libéralisation de l’avortement, même encadrée. Ainsi, Ahmed Raïssouni, ancien président du Mouvement unicité et réforme (MUR), matrice idéologique du PJD, est radicalement opposé à l’avortement car « c’est une atteinte à la vie ». Rappelons que ce dernier a déclaré que « l’avortement devrait être permis dans un seul cas. Celui des futurs militants pour la légalisation de ce dernier. Il serait convenable d’avorter ces fœtus qui lutteront par la suite pour cette question ». 

Dans cette catégorie, on retrouve également Mokri Abouzaïd. Celui-ci, ancien conseiller du chef du gouvernement Abdelilah Benkirane, estime « bizarre que certains soient contre la peine de mort pour les condamnés au moment où ces mêmes personnes sont pour l’avortement ». Pour lui, la réforme qui devrait être mise en place porte sur le système des valeurs, et ne devrait pas passer par la légalisation de l’avortement mais plutôt par l’éducation.

Les PJDdistes contre la réforme de la loi appuient leurs argumentations sur la doctrine malékite, et voient en la légalisation de la procédure une manière de protéger juridiquement les médecins qui la pratiquent.

A l’issue de la réunion, les deux camps ne sont pas parvenus à un consensus ou à un compromis.

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