Classique. Le film noir de François Truffaut

Tirez sur le pianiste n’est pas le film le plus connu du réalisateur, pourtant ses dialogues sont mythiques. A découvrir.

Dans les années 1960, ce ne sont pas des films de gangsters que les réalisateurs de la nouvelle vague française voulaient faire. C’est peut-être un peu pour ça, et pour l’amour du cinéma américain, que François Truffaut en a fait un. Après les Quatre cents coups, grand succès critique, le cinéaste réalise Tirez sur le pianiste, une adaptation du roman Down there de David Goodis. Dans ce long-métrage en noir et blanc, il y a tous les incontournables de la série noire américaine : malfrats, pistolets et course-poursuite. Deux gangsters sont aux trousses de Chico, une petite frappe qui trouve refuge chez son frère Charlie. Ce dernier, pianiste dans un bar, est poursuivi à son tour par les traqueurs de son frère. Mais Tirez sur le pianiste est d’abord un film « truffautien », ses gangsters sont plus comiques que méchants et la trame de l’intrigue n’est pas policière, elle est amoureuse. Le pianiste, campé par Charles Aznavour, a eu une autre vie avant de jouer dans un bar. Il était un musicien connu et avait une femme. Le film est construit autour des relations qu’il a eues avec son épouse, et celles qu’il entretient avec la serveuse, Léna (Marie Dubois). Les dialogues entre les deux sont merveilleusement bien écrits. Lors d’une promenade avec Léna, Charlie (qui a déjà la timidité, la maladresse et l’intelligence d’Antoine Doinel, personnage mythique de Truffaut), se parle à lui même : « Ton silence doit lui paraître bizarre, il faut que tu dises quelque chose, n’importe quoi, sinon elle va croire qu’elle t’intimide ». L’angoisse de Charlie se poursuit dans sa tête en jolies phrases : « Au fond, si elle n’est pas idiote, ce silence est éloquent. Il crée une complicité amoureuse. Ah ça, elle n’est pas bavarde, c’est plutôt le genre sérieux. Pas pimbêche mais digne. La plaisanterie facile ce n’est pas pour elle ». Tirez sur le pianiste n’est pas le meilleur film de Truffaut, mais c’est l’un des plus accessibles, et l’humour et l’écriture y sont réussis.

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