Zakaria Boualem pensait vous parler de la vague de froid, mais...

Par Réda Allali

Zakaria Boualem est un peu perturbé. Il voulait vous proposer ses profondes pensées sur la victoire de la Zambie en Coupe d’Afrique, l’histoire de glorieux anonymes coachés par un type sous-diplômé, selon notre fédération, puis il s’est rendu compte que c’était profondément inutile. Tout ceux qui veulent comprendre ont déjà compris, les autres ne comprendront jamais. Il se contentera donc de remercier le football pour lui avoir rappelé pourquoi il l’aimait tant. Il a ensuite pensé à vous parler de la vague de froid. Pas celle qui nous précipite sous nos bettaniate en plein après-midi, non, l’autre, celle qui frappe les montagnards, à la recherche de bois pour se chauffer et qui ont un peu de mal à percevoir l’édification du Maroc moderne. Les photos sont terribles… On se demande pourquoi ils restent sur place, ces gueux, au lieu de venir en ville s’installer dans un confortable bidonville où ils pourraient se former aux nano-technologies. Au lieu de cela, en nihilistes complets, ils restent perchés sur leur montagne, où même une opération d’aide filmée est difficile à organiser. Leur mauvaise volonté est telle qu’ils pourraient bien refuser de prendre le TGV lorsqu’il sera prêt, juste pour le plaisir de faire capoter nos grands projets. Encore des gens qui se demandent ce que leur pays peut faire pour eux au lieu de se poser la question inverse, comme le suggérait ce bon John Fitzgerald Kennedy, qui ne connaissait pourtant pas l’Atlas marocain. Ils ne se rendent même pas compte qu’ils ont un rôle à jouer dans notre pays, dont chacun sait qu’il est à cheval entre tradition et modernité : celui d’hommage vivant à la tradition, justement. A ce niveau d’aveuglement, on ne peut rien pour eux… Un autre sujet inutile, donc… Ensuite, Zakaria Boualem, à qui le responsable de cet estimable magazine a demandé de monter un peu le niveau, a décidé de pencher sur cette histoire de crise grecque. Lorsqu’on lui a expliqué que c’était à cause de l’euro, il a pensé qu’on lui parlait de celui de 2004, celui qu’ils ont volé. Pas du tout. On a dû lui démontrer que les Grecs étaient un troupeau d’infâmes magouilleurs qui, à force de trafiquer pour vivre au-dessus de leurs moyens, avaient fini par précipiter leur pays, et peut-être l’Europe, dans un chaos économique tel qu’ils pourraient bien finir par envoyer des CV aux miséreux du Haut-Atlas pour leur quémander un boulot. C’est évidemment une théorie absurde. Parce qu’il est clair que personne ne laissera les Grecs s’enfoncer dans la préhistoire, de même que personne ne viendra offrir aux montagnards marocains une vie de Grec, même en crise. C’est que la capacité de mobilisation des financiers qui nous gouvernent ne dépend pas de l’urgence d’une situation, mais bien de la capacité de nuisance de ceux qui en sont victimes. Les Grecs, s’ils coulent, entraînent l’Europe avec eux. Ne demandez pas à Zakaria Boualem pourquoi, il paraît que c’est une évidence, même s’il n’a pas bien compris. Alors que le naufrage des montagnards ne nuit à personne. Ils pourraient bien faire grève, mais ils ne travaillent pas, ou bloquer une route si on leur en avait construit une. Ils pourraient faire un ou deux sit-in, mais ils risquent de geler sur place avant que nos médias ne s’intéressent à eux. Ces gens ne disposent même pas de Facebook pour organiser un minimum le marketing de leur révolte. Autant dire que c’est foutu pour eux, alors que les Grecs ont de bonnes raisons d’espérer décrocher un ou deux euros rapidement pour leur remonter le moral… Inutile, donc, de s’attarder sur le sujet. Il faut en trouver un vrai, de sujet. Ce sera pour la semaine prochaine, puisque cette page est terminée, ce qui constitue la seule vraie bonne nouvelle de cette chronique, et merci.